Retour « Psychiatrie citoyenne » - Pôle de santé mentale de Lilles-Est - France

Le pôle de santé mentale de Lille-Est (59G21 En France, le système de santé mentale est territorrialisé. En ce qui concerne les services pour adultes, le pays est divisé en 850 secteurs environ de quelque 70 000 habitants chacun. Le secteur de Lille-Est porte le numéro 59G21 et ne concerne que les adultes. Six villes de banlieue font partie de ce secteur : Faches-Thumesnil, Hellemmes-Lille, Lesquin, Lezennes, Mons-en-Barœul et Ronchin.) s’est transformé au cours des trois dernières décennies dans le but principal d’éviter le recours à l’hospitalisation traditionnelle (contribution n° 19A). La coordination de ce changement a été assurée par l’EPSM Lille métropole, un pôle de santé mentale comprenant les villes de Faches Thumesnil, Ronchin, Lesquin, Hellemmes, Mons en Barœul et Lezennes.

Le Guide de l’OMS (2021, p.161) sur les services de santé mentale communautaires décrit ainsi ce service :

Le pôle de santé mentale de Lille-Est promeut le concept de « psychiatrie citoyenne ». Desservant une population de 88 000 habitants du sud-est de la métropole lilloise, il s’est construit sur une période de plus de 40 ans de réorganisation et de réforme du système de santé mentale. Ce pôle de Lille-Est montre qu’il est possible de passer de soins hospitaliers à des interventions communautaires diversifiées destinées aux personnes ayant des troubles mentaux ou des handicaps psychosociaux, avec des investissements comparables à ceux des services de santé mentale traditionnels. Cette approche prône le respect des droits des personnes qui ont recours aux services de santé mentale ainsi que leur autonomisation, même si elle s’inscrit dans un contexte juridique national plus restrictif.

L'établissement public de santé mentale Lille-Métropole joue un rôle central dans la gestion de ce pôle, notamment dans les mécanismes régionaux de contrôle et de planification (Organisation mondiale de la santé, 2021, p.161).

La contribution (19A) aborde plusieurs principes directeurs de ce pôle, notamment : les droits humains et la conviction que des troubles de la santé mentale ne doivent empêcher quiconque d’exercer ces droits ; un engagement à ne pas confondre les soins de santé mentale et la suppression de la violence et des risques ; la nécessité pour la société, et par conséquent les services de santé mentale, de s’adapter aux besoins des individus et non l’inverse ; l’engagement à fermer les lieux d’exclusion médicaux et sociaux qui isolent effectivement les usagers de leurs communautés ; l’engagement à lutter contre la stigmatisation et la discrimination fondées sur les troubles mentaux, y compris les préjugés de dangerosité et d’incapacité.

Les services formels du pôle s’impliquent à titre de partenaire auprès des autres parties prenantes, notamment des usagers des services et de leurs familles, des ONG, des élus des municipalités et des autres acteurs dans le domaine de la santé mentale.

Cette vaste initiative comprend deux composantes clés : la Coordination territoriale du parcours de rétablissement et « la disponibilité, la réactivité, la proximité ».


 i. Coordination territoriale du parcours de rétablissement

Cette composante consiste à « intégrer l’ensemble du système de santé mentale dans la ville, via un réseau impliquant tous les acteurs concernés : usagers, professionnels, familles et élus » (Roelandt et al., 2010).

Avec près de 70 dispositifs de prise en charge ambulatoire, le pôle offre à la population des services de prévention, de diagnostic, de soins et de suivi ainsi que des installations pour les adultes, les adolescents et les enfants. Les Centres médico-psychologiques (CMP) ou les Centres de santé mentale (CSM) constituent les portes d’entrée du dispositif. Ces centres organisent des actions de prévention, de diagnostic, de soins ambulatoires et d’intervention à domicile. Selon les sources, cette initiative met en jeu un dispositif de soins communautaires qui permet le maintien des personnes concernées le plus près possible de leurs domiciles, résidences, familles et communautés (contribution 19A). Les dispositions prévues par cette initiative publique et ce programme mettent en relation les organisations et instances sanitaires, politiques et sociales, notamment : les médecins généralistes et acteurs de la santé, les élus, les associations et les représentants des usages, les acteurs médicaux-sociaux et les bailleurs sociaux. Tous ces rouages s’appuient sur les « conseils locaux de santé mentale » qui rassemblent tous les partenaires (contribution n° 19A).

Ce dispositif multiservice contribue, selon les sources, à offrir un soutien adapté à une personne à toutes les étapes d’une crise de santé mentale, et à éviter les séparations strictes entre les types de prise en charge des services. L’intéressé peut ainsi, à des périodes différentes, effectuer un séjour hospitalier, avoir recours à des soins intensifs au domicile, entreprendre un traitement communautaire volontaire et des consultations en ambulatoire ou faire appel à un « service d’aide dans le domaine des loisirs ». Tous ces services sont assurés par le même groupe de professionnels comprenant des pairs aidants, des psychologues et des psychiatres, qui échangent régulièrement des informations.

Les différentes possibilités offertes sont conçues pour favoriser l’autodétermination et éviter les soins sous contrainte, en particulier lors des arrivées aux urgences ou des mesures coercitives qui sont appliquées dans des services extérieurs au pôle de psychiatrie de l’Établissement public de Lille-Est. Le fait d’élargir l’offre de solutions de soins proposées permet de mieux répondre aux souhaits des personnes et améliore, selon les sources, l’implication des patients par rapport au soutien reçu (contribution n° 19A).

Depuis 2014, l’EPSM a adopté clairement une approche « centrée sur le rétablissement », chaque professionnel ayant reçu une formation afin de respecter une charte d’engagement en faveur de soins axés sur le rétablissement. Selon les sources, cela a permis d’harmoniser la culture du service dans les différents services fournis. Les usagers sont invités à élaborer des directives anticipées (voir les exemples à la p. 2) et des plans de crise pour aider les services à respecter leurs souhaits pendant les crises. Au niveau supérieur, la coordination assurée par le conseil local de santé mentale permet la mobilisation de services partenaires pour défendre les droits des personnes et leur garantir le meilleur soutien sanitaire et social possible. Le conseil propose également des actions de prévention et d’information sur la santé mentale, les crises et les soins post-crise et apporte un soutien aux personnes en difficulté dans la vie quotidienne. Selon les informations communiquées, la proximité et la coordination avec des intervenants de première ligne contribuent à renforcer la confiance et à améliorer l’accès aux soins tout en limitant les pratiques coercitives (contribution n° 19A).

Les unités d’hospitalisation s’emploient activement à limiter le recours à la contention et à développer les alternatives à l’hospitalisation.

Le Centre de crise accueille 15 usagers, pendant une durée de séjour moyenne de 14,6 jours, est disponible 24 h/24 et 7 j/7, avec une présence de 8 h à 10 h et un accueil téléphonique de nuit.

Les consultations ambulatoires et le soutien en cas de crise s’appuient sur les plans de prévention des crises et de rétablissement (selon le modèle des directives anticipées) qui permettent d’adapter le parcours de soins de l’usager en fonction de ses valeurs et souhaits dans toutes les structures qu’il rencontre. Ces plans sont établis avec la personne, ses proches, mais aussi en coordination avec son médecin traitant ou d’autres parties prenantes, selon les souhaits de l’intéressé.

L’intégration de médiateurs de santé pairs (voir ci-après la partie E(b)(iii) Médiateurs de santé pairs p.2) permet de garantir cet accompagnement par les pairs. À tous les échelons de l’organisation, des représentants désignés par les usagers pour participer au développement du service « permettent d’évaluer la démocratie sanitaire » (contribution n° 19A).

Deux fois par jour (9 h et 20 h 45), une coordination téléphonique entre les services est indispensable au fonctionnement du dispositif, une équipe médicale de garde étant toujours disponible. Tous les matins, les services d’urgence sont contactés afin de savoir si une personne en crise s’est présentée dans le secteur et de mieux anticiper ainsi les interventions nécessaires. La disponibilité et la réactivité ont également une importance capitale, notamment pour éviter l’aggravation des situations de crise et les mesures coercitives en résultant. Dans cette optique, le service propose :

  • L’évaluation des nouvelles demandes dans les 48 heures
  • La gestion des urgences dans des structures externes et à domicile.
  • Un suivi renforcé à domicile
  • L’amélioration de la proximité à titre d’atout dans l’offre de soins aux personnes en difficulté
  • Le suivi de longue durée des personnes ayant des handicaps psychosociaux ; et
  • La gestion des hospitalisations psychiatriques. (contribution n° 19A)

La coordination renforcée avec le médecin traitant est assurée dans le cadre d’entretiens et, si nécessaire, d’appels téléphoniques, et une lettre de liaison lui est adressée après chaque consultation avec l’usager.

Enfin, grâce aux partenariats du service, son personnel défend les intérêts et promeut les droits des usagers, notamment dans le cadre de demandes de ressources, de logements, d’accès à la santé, etc.


ii. « Disponibilité, réactivité, proximité »

Le deuxième axe principal de la démarche de l’EPSM est une unité mobile d’urgence, les Soins Intensifs Intégrés dans la Cité (SIIC), qui fonctionne depuis 15 ans et qui est la plus grande équipe de France en termes de nombre de personnes accompagnées. Le SIIC a deux missions distinctes :

  • Accès permanent aux soins (24 h/24 et 7j/7) : astreinte médicale et téléphonique et coordination avec les organisations locales ; et
  • Capacité à assurer la prise en charge intensive à tout moment de 15 cas, qu’il s'agisse d’une crise ou d’un besoin de suivi intensif.

L’activité d’astreinte médicale est assurée grâce à la coordination entre le médecin d’astreinte et l’équipe SIIC. Elle vise à apporter une réponse rapide et adaptée aux situations de crise afin de permettre l’admission d’une personne dans le dispositif de soins. Le service comprend les interventions d’urgence à domicile en cas de crise, qui restent placées sous la responsabilité du SIIC et non des services d’urgence généraux (comme la police ou les ambulanciers).

La décision de prise en charge d’une personne par le service est médicale et les « procédures sont définies de manière concertée par l’usager, ses proches, l’équipe et le médecin » (contribution n° 19B). Le SIIC est un service conçu pour répondre aux situations de crise exceptionnelles. Il devrait également aider les usagers à élaborer des outils autonomes de gestion de crise.

En outre, un Service Médico-Psychologique de Proximité (SMPP) gère deux dispositifs de prise en charge ambulatoire de l’EPSM (Organisation mondiale de la santé, 2021, p.161). Les services du SMPP comprennent une équipe pluridisciplinaire (médecins, infirmiers, travailleurs sociaux, psychologues, psychiatres, médiateurs de santé pairs, secrétaires) qui travaillent en étroite collaboration pour garantir des soins de qualité adaptés aux besoins de la population. L’OMS décrit le SMPP de la manière suivante :

Une personne est orientée vers le SMPP par un médecin généraliste. L’accueil est suivi d’une évaluation, sous 48 heures, des besoins de la personne en matière de santé mentale et physique. Chaque évaluation est alors examinée par une équipe pluridisciplinaire qui détermine les besoins de prise en charge et de soins. Les consultations se déroulent dans différents lieux, notamment un centre d’aide sociale pour les jeunes qui leur donne accès directement au SMPP sans être orientés par un médecin. Il n’y a pas de liste d’attente et le service peut également effectuer des consultations à domicile.

La notion de « parcours de soins » est à la base du partenariat du SMPP avec les autres services locaux. Le parcours doit répondre aux besoins des personnes qui ont des troubles mentaux ou des handicaps psychosociaux et de leurs soignants et familles et, dans ce cadre, tenir compte de leur situation géographique. Pour atteindre cet objectif, un partenariat entre le SMPP et les communes locales est essentiel. Les consultations peuvent se tenir à divers endroits (mission locale, piscine, centre de services sociaux, centre d’accompagnement en addictologie, centre sanitaire communautaire, etc.). Deux réunions multidisciplinaires se tiennent chaque semaine pour orienter les nouvelles demandes en fonction des besoins des usagers et affiner la qualité du diagnostic et de l’offre de soins. L’objectif du SMPP consiste à faire participer l’usager de manière coopérative afin de favoriser son rétablissement.

Les trois autres éléments fondamentaux du pôle de santé mentale de Lille-Est sont les suivants :

  • Approche de « l’autonomisation orientée sur le rétablissement »
  • Élaboration de plans de prévention et de gestion des crises, et
  • « Solutions de substitution à l’isolement et la contrainte ».

Chacune d’entre elles est examinée brièvement ci-après.


iii. « Autonomisation orientée vers le rétablissement »

Les soins orientés vers le rétablissement (SOR), un modèle ou une approche des soins intégré dans le secteur 59G21 en 2014, visent à aider l’usager à mieux vivre avec son trouble ou son handicap et à conserver la possibilité d'avoir une vie familiale, professionnelle et sociale satisfaisantes (contribution n° 19H). Cette approche repose sur un modèle de partenariat : « Elle respecte les droits de la personne à occuper le siège du conducteur, mais reconnaît également l’intérêt d’avoir un (ou plusieurs) co-pilote(s) professionnels et soutien(s) naturel(s) » (contribution n° 19H). Les SOR sont conçus pour permettre aux usagers d’être maîtres de leur rétablissement et ils visent à surmonter l’aliénation et la marginalisation des personnes ayant des troubles mentaux ou des handicaps psychosociaux. Trois « niveaux d’aliénation » sont décrits : 

  • Le niveau 1 a trait à la maladie et aux symptômes ; 
  • Le niveau 2 concerne la représentation de soi-même en tant que personne malade, à savoir « la stigmatisation intériorisée » ;  
  • Le niveau 3 est celui de l’aliénation créée par l’organisation sociale et sa capacité (ou son incapacité) a intégrer les personnes ayant des troubles mentaux ou des handicaps psychosociaux (contribution n° 19H). 

Plus concrètement, les SOR tels que les pratique le pôle Lille Est comprennent les actions suivantes : 

Intégration des connaissances acquises par l’expérience (avec la participation « d’experts d’expérience ») dans la formation des professionnels, ce qui :

  • améliore les connaissances des associations sanitaires et sociales
  • entretient l’espoir d’une évolution des troubles de la personne
  • favorise des relations horizontales avec les aidants/accompagnants (pour atténuer notamment les asymétries de pouvoir entre les aidants et les bénéficiaires).
  • Intégration des médiateurs de santé pairs dans les équipes professionnelles (ils étaient 5 en 2020).

Promotion de la démocratie sanitaire 

  • Création d’espaces et d’outils participatifs
  • Forums trimestriels coanimés par un médiateur de santé pair et des porte-paroles des usagers
  • Rencontres régulières « paroles aux usagers » animées par des médiateurs de santé pairs
  • Fiches « suggestions/réclamations » sur les établissements consultés 
  • Un dispositif qui permet aux usagers des services de signaler un événement indésirable à la direction.
  • Évaluation de la qualité et du respect des droits (QualityRights) par l’OMS et intégration des recommandations dans le projet de pôle (voir Organisation mondiale de la santé, 2021, p. 161 à 163). 

Élection de porte-paroles par les usagers du pôle

  • Élection de trois porte-paroles des usagers du pôle de services : 
  • Participation des porte-paroles qui sont fortement impliqués dans le comité de direction du pôle, les réunions sur l’organisation et les groupes de travail ; 
  • Participation d’un porte-parole à la formation QualityRights.

Les autres outils orientés vers le rétablissement employés dans le secteur 59G21 sont les suivants : formation formelle axée sur le rétablissement pour la direction ; création d’une « Charte rétablissement » signée par les membres du personnel qui s’engagent dans ce processus ; engagement des services à employer des médiateurs pairs et adaptation, si nécessaire, du lieu de travail à ces travailleurs, et mise au point d’un plan de gestion et de prévention de crise (décrit dans la partie suivante).


 « Plan de prévention et de gestion de crise » 

Le plan de prévention et de gestion de crise, ou plus simplement « plan de crise », est un outil efficace de planification anticipée (contribution n° 19G). (Pour une analyse plus complète des méthodes planification anticipée, voir p.82). Un plan de crise est censé servir de méthode de prévention des rechutes, à rédiger pendant ou après qu’une personne a été hospitalisée ou a bénéficié d’un suivi intensif. L’usager, la famille et les amis ou professionnels de santé peuvent alors utiliser le plan dès qu’une situation de crise se présente. Le plan de crise est un outil évolutif « orienté vers le rétablissement » destiné à aider les personnes à prendre conscience de leurs points forts et ressources, à reconnaître les éléments déclencheurs et signaux d’alerte d’une crise ou d’un trouble et enfin à leur permettre de formuler des directives anticipées sur les actions et attitudes à adopter pour éviter ou gérer les crises. 

Ces directives permettent également de limiter les difficultés liées aux soins. Lorsqu’ils ont connaissance du plan de crise d’un usager, les professionnels, la famille et les aidants savent comment procéder pour mieux respecter les droits, les besoins et les souhaits de l’usager s’il traverse une période de crise. Le premier intéressé est l’usager lui-même qui élabore son plan de crise, mais aussi toutes les personnes qu’il estime impliquées dans son processus de rétablissement et qui peuvent l’aider à établir ce plan s’il le souhaite. Selon les sources, cette pratique est très courante au sein du secteur 59G21 et dans d’autres services de l’EPSM Lille-Métropole. En France, d’autres services adoptant une approche axée sur le rétablissement ont élaboré des outils similaires. Voir à ce propos le programme « GPS » utilisé en Île-de-France, qui est décrit à la p.83 de ce rapport.


« Solutions de substitution à l’isolement et à la contrainte »

Comme indiqué plus haut, l’ensemble du parcours de soins de l’EPSM est censé promouvoir l’accès aux soins en préservant l’autonomie et par conséquent en évitant les restrictions de liberté. Il est « exceptionnel » qu’un usager soit placé sous contention dans la clinique centrale qui fait partie du pôle 59G21 (Clinique Jérôme Bosch {JB]). 

La clinique JB a une capacité d’accueil de 10 lits d’hospitalisation et 2 chambres ont un lit pour accompagnant pour les usagers qui souhaitent la compagnie d’une personne de confiance ou un accompagnement durant leur séjour à la clinique. Le service mobilise le réseau de soutien de la personne pour contribuer aux négociations, à la sécurité et éviter les conflits. 

En 2019, la durée moyenne de l’hospitalisation est de 6,5 jours. Lors de l’admission, selon l’examen du service effectué par l’OMS (2021, p. 162), « des informations écrites et verbales sur les droits et obligations de l'individu sont fournies ».

La contention est considérée comme un dysfonctionnement qui fait l’objet d’un rapport d’événement indésirable et est généralement perçue comme un acte de maltraitance (document n° 19I). Selon les sources, un seul cas de contention (d’une durée de 3 h) a été recensé en 2019 ; en 2020, il n’y en a eu aucun. La clinique JB n’a pas de chambres d’isolement.

La notion de liberté est particulièrement importante dans le secteur 39G21. L’objectif de ce programme est « zéro isolement, zéro contention » (contribution n° 19). Ces pratiques visent à désamorcer les situations de violence avant pendant et après une crise. Selon les informations communiquées, les « situations de violence sont moins fréquentes dans la mesure où les droits sont respectés et les restrictions minimales, exposées et justifiées (contribution n° 19I). La décision de laisser les portes ouvertes contribue à lutter contre l’impression d’enfermement. 

Les caractéristiques du dispositif de l’EPSM et du service 59G21 décrits plus haut sont considérées comme des conditions préalables requises pour limiter et éviter l’hospitalisation. Les solutions pour remplacer l’isolement et la contention sont notamment les suivantes :

  • Les professionnels suivent une formation spécifique « OMEGA » qui leur permet de repérer les risques de crise « en amont » et de la désamorcer le cas échéant (98 % du personnel a suivi la formation en 2020).
  • Un plan de prévention et de gestion de la violence est établi avec l’usager dès son admission et pendant toute la durée de son séjour ; 
  • Présence permanente, et si nécessaire individuelle, d’un soignant ;
  • Tous les membres du personnel bénéficient de l’aide de pairs membres du personnel, qui ont une expérience des situations complexes. L’accès au soutien par les pairs est considéré comme essentiel dans une approche axée sur le rétablissement, pour susciter l’espoir chez les usagers et soignants et faire évoluer les mentalités des professionnels (contribution n° 19I) ; 
  • Les effectifs sont adaptés au niveau de risque potentiel, avec une possibilité de présence constante et de surveillance d’une personne, si nécessaire ;
  • Des « agents de prévention » sont sollicités à l’occasion pour apporter une aide dans certaines situations. La présence de ces agents est bénéfique et rassurante tant pour les autres usagers que pour les professionnels. Il s’agir de professionnels de la sécurité qui interviennent au cas par cas pour accompagner une personne en continu, 24 h/24 aussi longtemps que la situation le nécessite. En 2019, le nombre d’usagers ayant eu besoin d’un agent de prévention était de 20, soit 138 journées.

Si une personne est mise sous contention (ce qui est très rare, comme indiqué plus haut), un protocole de contrainte est respecté et l’événement est analysé a posteriori avec l’usager et l’équipe. Une fiche sur l’événement indésirable est établie afin de mieux comprendre ce qui s’est passé. Une réunion interdisciplinaire de retour sur la situation donne lieu à la formulation de recommandations. 

Les chambres sont individuelles et respectent l’intimité et la vie privée. Elles sont équipées de téléviseurs. L’espace et les équipements favorisent le bien-être (« salle de psychomotricité, hydrothérapie, espace réservé aux activités, salle de repos, salle d’ordinateurs »). L’architecture de la clinique favorise la circulation ; elle comprend des espaces ouverts avec un libre accès au jardin. Le contrôle de ces espaces est essentiel pour respecter les besoins de sécurité de toutes les personnes. La clinique offre des espaces de promenade et d’accompagnement personnel, une source d’apaisement sans privation de liberté. Elle dispose d’un système d’aromathérapie dans l’ensemble de sa structure pour diffuser des essences apaisantes jour et nuit. 

La présence constante de psychiatres pour adapter les soins est essentielle, car elle permet de veiller à ce que les équipes ne restent pas en circuit fermé. En ce qui concerne le soutien par les pairs, des mesures sont prévues pour que les personnes de soutien défendent les droits des usagers, y compris en cas de contention associée à l’hospitalisation.


Résumé de l’impact et des réalisations du pôle de santé mentale de Lille-Est

Selon l’Organisation mondiale de la santé (2021, p. 163), la réalisation majeure de ce réseau peut se résumer en soulignant « la baisse continue du taux des admissions hospitalières qui sont passées de 497 admissions en 2002 à 341 admissions en 2018, malgré l'augmentation considérable du nombre de personnes ayant reçu des soins dans le réseau sur la même période, qui est passé de 1677 personnes en 2002 à 3518 personnes par an en 2018 ». Par ailleurs : 

La durée moyenne d’un séjour hospitalier a également baissé, passant de 26 jours à 7 jours sur la même période. En septembre 2018, une équipe d'évaluation indépendante a effectué une évaluation QualityRights portant sur l'ensemble des services de santé mentale de Lille Est. Dans trois des cinq objectifs fixés, les résultats ont été pleinement atteints :

  • i)    Droit de jouir du meilleur état de santé physique et mental possible 
  • ii)    Droit de ne pas être soumis à la contention, la violence, la maltraitance, et  
  • iii)    Droit à l’autonomie de la vie dans la société. 
     

Les deux objectifs restants : (iv) le droit à un niveau de vie adéquat et v) la reconnaissance de la personnalité juridique et le droit à la liberté et à la sûreté de la personne ont été partiellement atteints. Le cadre juridique actuel de la France a été considéré comme un obstacle important à la pleine réalisation de ces deux derniers objectifs.

Selon l’OMS (2021, p. 164), les autres signes de réussite comprennent les faibles taux de dépenses d’hospitalisation par rapport aux autres services de santé mentale (28,5 %) contre 61 % en France, ainsi que le faible coût de la prise en charge dans les services de santé mentale de Lille-Est par rapport aux zones métropolitaines voisines - des coûts en recul constant entre 2013 et 2017, passant de 3131 euros à 2015 euros par an (en juin 2021).

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