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INTERVENTION EN TIERCE PARTIE
La Commissaire intervient devant la Cour européenne des droits de l'homme dans des affaires concernant le droit à l'avortement en Pologne

La Commissaire a rendu publiques les observations écrites qu’elle a adressées, en qualité de tierce partie, à la Cour européenne des droits de l'homme, dans les affaires K.B. c. Pologne et trois autres requêtes, K.C. c. Pologne et trois autres requêtes, et A.L. - B. c. Pologne et trois autres requêtes concernant le droit à l’avortement en Pologne.

La Commissaire note que l’arrêt rendu en octobre 2020 par le tribunal constitutionnel polonais, qui a quasiment interdit l’avortement en supprimant l’une des trois exceptions où il était autorisé jusque-là, en l’occurrence le cas de malformation fœtale, représente la dernière étape d’un processus rendant de plus en plus restrictif le cadre juridique et procédural régissant l’accès à un avortement sûr et légal, ce qui a des répercussions néfastes sur les droits des femmes en Pologne. Cet arrêt doit aussi être envisagé dans le contexte plus large d’une dégradation de la situation concernant l’accès des femmes à la santé et aux droits sexuels et reproductifs dans le pays. La Commissaire conclut que, dans ce contexte, l’arrêt a créé une situation qui éloigne davantage encore la Pologne des obligations lui incombant au titre du droit international des droits de l'homme, en particulier de ses obligations découlant des articles 3 (interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants) et 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme. Cette situation, souligne la Commissaire, va aussi à l’encontre du principe de droit international des droits de l’homme de non-régression.

La Commissaire rappelle que l’obligation des États de garantir aux femmes un accès effectif à un avortement légal et sûr est l’une des principales composantes de leur obligation de respecter et de garantir les droits humains des femmes. En outre, la Commissaire souligne qu’il ne suffit pas de légaliser la prestation de services permettant un avortement sûr pour remplir les obligations en matière de droits de l’homme ; les États doivent aussi prendre des mesures concrètes pour garantir la qualité des services d’avortement et pour faire en sorte que ces services soient disponibles et accessibles en pratique.

La Commissaire observe que la dégradation de la situation en Pologne contraste fortement avec la législation dans la grande majorité des États membres du Conseil de l'Europe qui légalisent l’accès à l’avortement. À cet égard, la Commissaire souligne qu’il y a en Europe un solide consensus en faveur de l’accès à un avortement sûr et légal et que la tendance générale est à la levée des obstacles qui subsistent en droit et en pratique dans ce domaine.

Elle conclut que, pour assurer la protection effective des droits humains des femmes, la Pologne devrait garantir d’urgence à toutes les femmes et filles le plein accès à un avortement sûr et légal, dans des conditions adéquates, en mettant sa législation et sa pratique en conformité avec les normes internationales des droits de l'homme, notamment la Convention, et avec les bonnes pratiques régionales.

Les interventions en qualité de tierce partie devant la Cour européenne des droits de l’homme figurent parmi les outils dont dispose la Commissaire pour contribuer à la promotion et à la protection des droits de l’homme. Prévues par la Convention européenne des droits de l’homme, elles s’appuient sur les activités thématiques de la Commissaire et sur ses activités de suivi par pays.

Strasbourg 10/11/2021
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