La Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Dunja Mijatović, a publié aujourd’hui le rapport sur sa visite en République tchèque de février 2023, qui comporte des recommandations principalement consacrées aux droits humains des Roms et des personnes handicapées. Le rapport traite aussi du cadre général de protection des droits humains, des mesures de lutte contre la violence à l’égard des femmes et de la situation des personnes LGBTI.
Étant donné que des progrès tangibles dans la promotion des droits des Roms font généralement défaut, il est essentiel de redoubler d’efforts pour améliorer la situation de manière décisive.
La création d’un mécanisme d’indemnisation pour les personnes soumises à une stérilisation forcée a été une étape essentielle afin de rendre justice aux victimes qui l’attendent de longue date. Pour que ce mécanisme soit efficace, sa mise en œuvre doit cependant évoluer, notamment en ce qui concerne la fourniture de preuves médicales et la charge de la preuve pesant sur les victimes.
Un changement de paradigme passant par l’abandon de la pratique des tests générateurs d’exclusion est nécessaire pour lutter contre la discrimination persistante des enfants roms dans le domaine de l’éducation, y compris en vue de l’exécution de l’arrêt D.H. et autres de la Cour européenne des droits de l'homme. Les autorités devraient élaborer une stratégie globale de déségrégation et mieux soutenir et promouvoir les bonnes pratiques existantes. Il est essentiel d’apporter un soutien personnalisé, adéquat et continu aux enfants roms et aux enfants handicapés pour permettre leur inclusion dans le système éducatif ordinaire.
Les mesures de lutte contre la discrimination des Roms en matière de logement, sur le marché du travail et dans leurs relations avec la police ont besoin d’être renforcées. Des efforts extraordinaires sont déployés par les autorités tchèques et par la société tout entière pour accueillir les réfugiés ukrainiens, mais il est préoccupant de constater que les Roms ne bénéficient pas de la même protection ni du même soutien que les autres réfugiés.
Pour que le droit des personnes handicapées de vivre de manière autonome dans la société devienne une réalité, il est nécessaire d’agir de manière concertée et de faire en sorte que l’aide sociale et les soins de santé ne soient plus assurés en institution mais par des services de proximité. Les investissements dans la construction ou la rénovation d’institutions devraient cesser et un programme clair de désinstitutionalisation doit être adopté. Les personnes handicapées doivent également disposer de moyens financiers suffisants pour mener une vie autonome.
De plus, il est nécessaire d’opérer un changement structurel pour que les soins médicaux soient dispensés sur la base d’un consentement libre et éclairé, et de garantir un accès effectif à la justice dans tous les cas liés à un placement d’office en institution ou à un traitement sans consentement. Il faut modifier la législation pour garantir aux personnes handicapées la jouissance de la capacité juridique dans tous les domaines, sur la base de l’égalité avec les autres.
Les autorités doivent s’employer tout particulièrement à lutter contre la maltraitance des personnes handicapées en institution, plusieurs cas choquants ayant été révélés ces dernières années. La désinstitutionalisation est essentielle pour réduire de manière structurelle le risque de mauvais traitements inhérent au placement en institution.
Concernant les autres aspects abordés dans le rapport, la Commissaire constate qu’il serait possible de renforcer encore le système global de protection des droits humains en République tchèque en désignant une Institution nationale des droits humains et une institution d’Ombudsman pour les enfants.
En outre, la République tchèque devrait ratifier enfin la Convention d’Istanbul, pour pouvoir combattre efficacement la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, et il faudrait adopter une définition du viol entièrement fondée sur l’absence de libre consentement.
Concernant les personnes LGBTI, la procédure actuelle de reconnaissance juridique du genre, qui nécessite une intervention chirurgicale, est en contradiction flagrante avec les droits humains et doit être réformée d’urgence. L’instauration de l’égalité en matière de mariage serait une mesure bienvenue en vue de remédier aux lacunes en matière de protection des couples de même sexe.