Les stéréotypes antitsiganes perdurent et continuent de se répandre dans un certain nombre de médias en Europe. Les médias ont un rôle important à jouer dans la lutte contre les préjugés mais, s’agissant des Roms et des Gens du voyage, certains journaux et médias de radiodiffusion n’assument toujours pas leurs responsabilités et nourrissent la xénophobie à coups de reportages tendancieux et de sensationnalisme au rabais. Il est temps de promouvoir un journalisme éthique et des codes de déontologie afin de rompre avec l’image largement négative des Roms que véhiculent les médias.
Le niveau de sensibilisation à la culture rom et aux défis auxquels les Roms, qui représentent la minorité ethnique la plus importante d’Europe, doivent faire face dans les sociétés européennes est malheureusement limité. De nombreux Roms vivent dans des conditions de marginalisation extrême , souvent victimes de racisme et de discrimination. Ils ne sont pratiquement pas représentés dans la sphère politique. Le fait que les Roms et les Gens du Voyage disposent des mêmes droits de l’homme que tout un chacun est souvent oublié.
L’antitsiganisme est exploité par des groupes extrémistes dans plusieurs pays européens, une tendance dangereuse à laquelle les médias contribuent et dont les conséquences peuvent être dramatiques. Ainsi, en Hongrie, entre 2008 et 2009, six Roms dont un enfant de cinq ans ont été assassinés de sang froid dans un climat de vives tensions attisées par les discours de haine.
La rhétorique anti-Rom en Europe
Même si le travail médiatique ne diffuse pas de discours de haine à proprement parler, il peut contribuer à véhiculer des stéréotypes, par exemple en ne mentionant les Roms et les Gens du Voyage que dans des reportages sur les problèmes sociaux et le crime, ou en faisant la promotion de préjugés comme celui laissant penser que les Roms vivent perpétuellement en marge de la loi, ou qu’ils sont responsables de leur propre exclusion parce qu’ils ont choisi d’être différents.
Un suivi systématique des médias roumains révèle qu’ils sont souvent à l’origine de cette chasse aux sorcières à l’encontre des Roms. De même, en Bulgarie, des articles haineux ont été publiés, comparant les Roms à du « bétail », à des « moutons », et des « loups ».
Un troisième exemple provient d’Italie, où de virulents discours et des stéréotypes négatifs à l’encontre des Roms, ont été la toile de fond de la multiplication des évictions et expulsions de ces dernières années et ont encouragé la population à accepter cet état de fait.
Ethique et codes de déontologie
Selon un principe éthique fondamental, on ne saurait incriminer tout un groupe pour les agissements éventuels de quelques-uns de ses membres. La stigmatisation généralisée de l’ensemble des Roms – dont la grande majorité n’est pas en conflit avec la loi – montre qu’il y a un grand besoin d’autorégulation et de journalisme éthique. La formation des journalistes, comme celle qui a été organisée dans le cadre de la campagne Dosta ! lancée par le Conseil de l’Europe, peut aider à améliorer le travail journalistique.
Il existe plusieurs médias s’adressant à la communauté rom et des réseaux permettant aux journalistes roms de se prendre mutuellement en main, mais peu de Roms sont employés ou consultés par les médias majoritaires, d’où une méconnaissance de leur point de vue par l’ensemble de la population. Grâce aux projets de jumelage de la Commission européenne, davantage de journalistes roms peuvent se faire une place dans les médias majoritaires, et les journalistes non-roms peuvent nouer des contacts avec les communautés roms de manière à être mieux armés pour trouver des explications et des solutions et ne pas se limiter aux problèmes.
La marche à suivre
Les médias ont une grande influence sur notre perception du monde, ce qui implique pour eux une grande responsabilité qu’ils négligent trop souvent.
La diffusion de préjugés sur les Roms et les Gens du Voyage contribue à leur exclusion sociale et devient un obstacle majeur à l’exercice de leurs droits fondamentaux. Bien que les journalistes et rédacteurs n’aient pas à se faire les porte-parole d’intérêts individuels, ils peuvent, par un véritable professionnalisme, participer à l’avènement d’une société plus équitable.
Thomas Hammarberg
Le carnet des droits humains de la Commissaire
Le carnet des droits de l'homme
Strasbourg
07/07/2011
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