La plus importante révolution de notre temps n’est pas allée assez loin : la libération des femmes. En dépit des nombreuses conférences sur les droits des femmes, des normes reconnues contre la discrimination et des promesses politiques en faveur de l’égalité des sexes, il existe un écart profond entre notre réalité quotidienne et nos discours.
Les femmes continuent à subir des violences physiques à une échelle choquante, elles font l’objet des discriminations sur le marché de l’emploi et sont outrageusement sous-représentées dans presque toutes les assemblées politiques. C’est aussi le cas en Europe.
Les normes ont été mises en place, mais pas vraiment mises en œuvre. Les instances politiques dominées par les hommes n’ont pas répondu avec suffisamment d’énergie à ces violations des droits de l’Homme.
La violence à l’encontre des femmes a été très souvent perçue comme relevant uniquement de la sphère privée. Une telle «privatisation » de la responsabilité ne doit pas être acceptée. Aujourd’hui la violence domestique est reconnue comme un problème de droits de l’Homme. Il s’ensuit que les autorités ont la responsabilité d’agir pour prévenir de tels abus.
Que les femmes soient souvent moins payées que les hommes pour un travail identique a été expliqué comme une conséquence des forces du marché qui échapperaient au contrôle des pouvoirs publics. Mais la rémunération égale pour un travail égal fait partie des normes principales de la Charte sociale européenne révisée et de l’OIT et doit être protégée par la loi.
Qu’il existe peu de responsables politiques femmes a été justifié par le faible nombre de candidates intéressées. La vérité est que les hommes politiques ont souvent protégé leur position de pouvoir. Là où des efforts honnêtes ont été faits pour encourager la désignation de femmes, l’équilibre a été amélioré.
En d’autres termes, les outils politiques sont là, si seulement nous nous intéressons à faire changer les choses.
Une mise en œuvre sérieuse nécessite une démarche à la fois stratégique et globale. Il a été démontré qu’une démarche soutenue en faveur de l’égalité des sexes dépend en grande partie des politiques familiales et sociales. Le changement dans un certain nombre de pays a été promu par trois facteurs en particulier :
la contraception qui a permis aux femmes de décider du moment d’avoir des enfants ;
des structures d’accueil pour les enfants qui permettent aux deux parents de travailler ;
des possibilités pour les femmes de trouver un emploi afin d’acquérir leur indépendance économique.
Quelle que soit la stratégie, elles ne sera effective que si les femmes sont entièrement représentées dans les instances décisionnelles. Ceci vaut bien évidemment pour les gouvernements et les parlements, mais aussi pour les assemblées régionales et internationales.
Le Conseil de l’Europe ne constitue pas une exception. A l’Assemblée parlementaire, les femmes ne représentent pas plus de 26% des membres et au Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux ce chiffre est de 27%. Seulement 13% des Ambassadeurs à Strasbourg sont des femmes. Parmi les 46 Ministres des Affaires Étrangères, 5 (11%) sont des femmes. Cela va sans doute changer, la question est à quelle vitesse.
Les droits des femmes et l’égalité des sexes ne doivent, toutefois, être considérés comme une préoccupation seulement des femmes. Le rôle des hommes dans ce combat est crucial – en tant que décideurs politiques, électeurs et membres de famille.
La contribution des hommes est également mentionnée dans le cadre du nouvel effort du Conseil de l’Europe de combattre la violence à l’encontre les femmes. Une Task Force a été mise en place et une campagne paneuropéenne est en cours de préparation afin d’être lancée en novembre.
Cette campagne mérite d’être fortement soutenue.
Thomas Hammarberg