Les tribunaux d’Europe ne sont pas tous parfaits : dans de nombreux pays, la durée excessive des procédures est en effet une réalité regrettable. Certes, il est largement admis que la lenteur des tribunaux est en soi un déni de justice ; pour autant trop peu de mesures ont été prises pour garantir des délais raisonnables. En témoigne le nombre énorme de requêtes introduites pour ce motif devant la Cour européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg, en provenance de France, de Grèce, d’Italie, de Pologne, du Portugal, de Turquie et d’autres pays.
Les tribunaux d’Europe ne sont pas tous parfaits : dans de nombreux pays, la durée excessive des procédures est en effet une réalité regrettable. Certes, il est largement admis que la lenteur des tribunaux est en soi un déni de justice ; pour autant trop peu de mesures ont été prises pour garantir des délais raisonnables. En témoigne le nombre énorme de requêtes introduites pour ce motif devant la Cour européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg, en provenance de France, de Grèce, d’Italie, de Pologne, du Portugal, de Turquie et d’autres pays.
Les procédures judiciaires indûment retardées constituent en soi une violation de la Convention européenne des Droits de l’Homme qui prévoit que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable » (article 6.1). Cette disposition s’applique aux procès civils et pénaux, ainsi qu’à certaines procédures disciplinaires et administratives.
En raison même du sujet sur lequel elles portent, certaines affaires exigent une diligence particulière. Les affaires concernant des cas de maladie, des conflits du travail, des décisions sur la garde d’enfants ou des demandes de dommages suite à une faute médicale sont autant d’affaires dites « prioritaires » pour lesquelles une solution rapide s’impose.
La Convention européenne précise que toute personne arrêtée ou détenue a le droit d’être aussitôt traduite devant une autorité judiciaire et d’être jugée dans un délai raisonnable (article 5.3).
Dans plusieurs résolutions, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe affirme que les retards excessifs dans l’administration de la justice représentent un grand danger, notamment pour l’état de droit.
Cet avertissement doit être pris au sérieux. La durée excessive des procédures tend à entamer la crédibilité de l’ensemble du système judiciaire. Le grand public a besoin d’avoir confiance en l’Etat, qui doit pouvoir rendre la justice en temps opportun. Sinon, la justice est illusoire et les citoyens risquent d’être tentés de prendre leurs affaires en main, ce qui est dangereux pour le bon fonctionnement de la société.
La sécurité juridique exige la résolution des litiges et le rétablissement de la paix sociale. Les usagers des tribunaux devraient être en mesure d’avoir une idée de la durée probable de la procédure. L’incertitude génère des frustrations et un sentiment d’impuissance.
La durée excessive des procédures peut également avoir des effets néfastes très concrets pour les deux parties :
- avec le temps, certains éléments de preuve disparaissent et il faut en fournir de nouveaux, ce qui peut causer des difficultés pratiques et financières ;
- les témoins risquent d’oublier certains détails importants, de perdre leur crédibilité ou de déménager ;
- les frais de justice peuvent augmenter.
Par ailleurs, les procédures longues peuvent elles-mêmes provoquer des violations d’autres droits de l’homme. Dans les affaires de garde d’enfants et d’autorité parentale, par exemple, le retard pris pour rendre une décision peut avoir des conséquences décisives ou irréversibles pour l’une des parties.
Naturellement, il faut souligner que dans certaines affaires, on doit raisonnablement prendre le temps d’examiner le dossier, notamment les affaires complexes (juridiquement ou du point de vue des faits) ou celles qui couvrent plusieurs niveaux d’appel. En outre, le comportement du requérant est un élément important. En tout état de cause, il convient de s’interroger sur les raisons des retards pris par la justice.
La possibilité de recours effectif devant une instance nationale importe tout particulièrement en cas d’allégations de durée non raisonnable des procédures. Cela a été souligné dans l’arrêt Kudła c. Pologne rendu par la Cour de Strasbourg le 26 octobre 2000. Il va de soi que les autorités nationales sont mieux placées que la Cour européenne pour accélérer les procédures en cours ou accorder réparation dans les délais prescrits.
A la suite de l’impulsion donnée par la Cour dans cet arrêt, plusieurs solutions ont été proposées par les Etats membres afin de prévoir, dans ce domaine également, des recours effectifs permettant de constater la violation et d’octroyer un redressement approprié. Cela comprend des mesures d’accélération des procédures des affaires en cours et d’indemnisation pour le préjudice subi.
Il va de l’intérêt du système de la Convention européenne de faire en sorte que son efficacité à long terme ne soit pas mise en péril par l’augmentation exponentielle du nombre de requêtes introduites devant la Cour de Strasbourg. Tout bien considéré, c’est avant tout aux Etats parties qu’il appartient de mettre en œuvre la Convention.
La création d’une voie de recours interne en cas de durée excessive d’une procédure judiciaire est un premier pas mais elle ne résout pas tous les problèmes. Il reste à attaquer le problème à la racine : amélioration de la gestion des dossiers, formation judiciaire, pénalités pour le retard dans la présentation de documents ou d’éléments de preuve, fixation de délais stricts, accroissement des ressources pour augmenter le nombre de juges, de greffiers et d’assistants.
Les améliorations apportées à l’administration de la justice peuvent ainsi contribuer à renforcer l’état de droit.
Thomas Hammarberg
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