« Malheureusement, les libertés d'expression, de réunion et d'association se détériorent en Azerbaïdjan. J'invite à nouveau les autorités à accorder de toute urgence une attention particulière à ces questions, de manière à respecter les obligations et engagements en matière de droits de l'homme contractés par l'Azerbaïdjan en tant qu'Etat membre du Conseil de l'Europe » a déclaré aujourd'hui Nils Muižnieks, Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, en rendant publiques ses observations (CommDH(2014)10) sur la situation des droits de l'homme dans le pays qui font suite à son rapport (CommDH(2013)14) publié en août 2013.
« Des poursuites pénales injustifiées et sélectives sont exercées sans relâche à l'encontre de personnes qui expriment des opinions dissidentes, y compris des journalistes, des bloggeurs et des militants. Cela est inacceptable. Toutes les personnes qui sont détenues en raison des opinions qu'elles ont exprimées doivent être libérées. »
Le Commissaire déplore en particulier une série d'arrestations qui seraient fondées sur des chefs d'accusation peu crédibles. Il s'agit notamment des arrestations de Parviz Hashimli, journaliste au Bizim Yol, de l'activiste en ligne Abdul Abilov et du blogueur Omar Mammadov. Le Commissaire est en outre préoccupé par les récentes condamnations du journaliste, universitaire et défenseur des droits des minorités Hilal Mammadov, ainsi que de Tofig Yagublu, vice-président du parti politique d'opposition Musavat et journaliste au Yeni Musavat, et d'Ilgar Mammadov, président du mouvement d'opposition « REAL ». « Un autre exemple inquiétant des tentatives d'intimidation de la presse concerne Khadija Ismayilova, une journaliste connue pour ses enquêtes sur la corruption, qui a été interrogée à plusieurs reprises par les services du Procureur général en février 2014. »
L'absence de progrès dans la dépénalisation de la diffamation et l'octroi d'indemnités disproportionnées dans le cadre des procédures civiles reste un obstacle majeur au respect par l'Azerbaïdjan des recommandations du Conseil de l'Europe et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. « Il faudrait changer la législation afin de dépénaliser totalement la diffamation et faire en sorte qu'elle ne puisse faire l'objet que de sanctions civiles proportionnées. »
Un autre motif de préoccupation tient aux restrictions supplémentaires infligées aux activités des organisations non gouvernementales par la loi signée par le Président d'Azerbaïdjan le 3 février 2014. « Cette nouvelle loi aggrave une situation déjà compliquée dans laquelle les activités des ONG font l'objet de restrictions disproportionnées. Les autorités devraient alléger plutôt que compliquer les exigences administratives imposées aux ONG. »
Le Commissaire fait aussi part de ses préoccupations concernant l'arrestation d'Anar Mammadli, président de l'Election Monitoring and Democracy Studies Center (Centre pour l'observation des élections et l'étude de la démocratie), qui fait l'objet d'une enquête pour activités illicites, évasion fiscale et abus de pouvoir. « Ces enquêtes semblent être en rapport avec les problèmes d'enregistrement de son organisation. La complexité des exigences en matière d'enregistrement pousse inévitablement un certain nombre d'ONG à fonctionner en marge de la loi. Une législation moins restrictive en la matière permettrait aux ONG de remplir leur fonction publique de sentinelles dans un environnement plus propice à leur travail. »
Par ailleurs, plusieurs manifestations pacifiques ont été récemment dispersées par la police, parfois en ayant recours à une force excessive, et des participants ont été arrêtés et condamnés à des peines de détention administrative et à des amendes. « La procédure de notification prévue par la loi devrait s'appliquer conformément aux normes européennes, qui établissent en outre qu'aucune autorisation ne devrait être exigée pour l'organisation de manifestations publiques. Les autorités devraient s'attacher à faciliter et à protéger les réunions publiques dans le lieu choisi par les organisateurs. »
Enfin, le Commissaire se dit préoccupé par la poursuite des démolitions d'habitations et des violations du droit à la propriété, et appelle les autorités à faire en sorte que « toutes les personnes visées par les expropriations aient accès à un recours effectif au niveau national. Toute future expropriation ou démolition devra s'effectuer dans le respect de la loi et en toute transparence, et s'accompagner d'indemnisations équitables, correspondant au prix du marché. »