Fortement engagées dans les processus de « gouvernement ouvert », notamment en matière de transparence des procédures et de participation des citoyens, les régions européennes multiplient les initiatives dans ces domaines, mais peuvent et doivent encore renforcer leurs actions. C’est la conclusion d’un débat, organisé le 3 avril 2019, dans le cadre de la Session de la Chambre des régions du Congrès.
Développé à partir de 2011 au sein des Nations Unies avec la signature de la déclaration sur le gouvernement ouvert, le concept de « gouvernement ouvert », d’abord expérimenté dans un petit nombre de pays, n’a cessé de progresser depuis. Il a aussi été largement repris et développé par de nombreuses régions au point, selon la présidente de la Chambre des régions, Gunn Marit HELGESEN (Norvège, PPE/CCE), que ces dernières sont aujourd’hui, en Europe, « les chefs de file de ces initiatives ».
Gouvernement ouvert : définition et initiatives
Introduisant les débats, Donatella PORZI, présidente de la Conférence des Assemblées législatives régionales européennes (CALRE) et de la région italienne d’Ombrie, estime que le gouvernement ouvert offre « un potentiel important pour améliorer tous les processus démocratiques ». Si le gouvernement ouvert s’organise autour de trois grands axes, à savoir la participation des citoyens, la transparence des décisions et la responsabilité des élus, Mme Porzi y ajoute aussi la notion de confiance ainsi que l’indépendance de la société civile par rapport au pouvoir.
Ces principes qui renforcent l’efficacité des politiques publiques se retrouvent aussi autour du citoyen numérique, bien formé et informé, capable de participer aux décisions dans la transparence. L’Ombrie a d’ailleurs développé plusieurs initiatives autour du citoyen numérique, dont une plateforme de dialogue destinée aux lycéens, « PeoSchool », qui les aide à se former à l’Europe et fonctionne comme un « Parlement européen » virtuel dont ils seraient les députés. De même, la région a mis en place un agenda numérique pour ses élus, qui leur permet de prendre connaissance en amont de tous les grands dossiers en cours de traitement, et qui sera bientôt accessible aussi au public par Internet.
De nouvelles relations entre les régions et les citoyens
Analyste des politiques à la Direction de la Gouvernance Publique de l’OCDE, David GOESSMANN a dressé un état des travaux de son Organisation sur les gouvernements ouverts, qui préfigurent selon lui l’avènement des « Etats ouverts ». Il a présenté quelques initiatives régionales prises dans les Etats membres de cette Organisation, dont les conseils de citoyens tirés au sort et appelés à délibérer sur tous les grands sujets régionaux traités par la communauté germanophone de Belgique.
Luis PETRIKORENA ARBELAIZ, directeur de « Gouvernement ouvert » au sein de la Présidence du Gouvernement Basque (Espagne), voit dans le gouvernement ouvert « une fenêtre vers la participation » et un moyen d’améliorer les échanges entre les citoyens et l’ensemble des niveaux de gouvernance locale et régionale. Si le gouvernement ouvert est une « aide » à la démocratie, il n’en garantit pas pour autant à lui seul la pérennité.
Le débat qui a suivi ces exposés a permis aux membres de la Chambre de présenter de nombreuses initiatives de gouvernement ouvert prises par leurs régions : parmi celles-ci, des conférences citoyennes sur l’intégration des réfugiés en Basse-Saxe ou sur la pollution de l’air à Stuttgart (Allemagne), mais aussi une plateforme de dialogue sur l’environnement créée par la capitale géorgienne, Tbilissi, ainsi que la publication régulière, en ligne, des budgets ouverts de la région russe de Leningrad. Dans ce même pays, a détaillé Farid MUKHAMETSHIN, aujourd’hui membre honoraire du Congrès, la République du Tatarstan a numérisé les documents et l’accès à 250 services publics, ce qui améliore la transparence et réduit le temps d’attente pour les citoyens. Aujourd’hui, grâce à des « blockchains » sécurisées, il est même possible de faire enregistrer en ligne des certificats de propriété foncière.
Consulter, mais aussi tenir compte des consultations !
Toutefois, la mise à disposition d’outils performants et le développement du dialogue avec les citoyens ne sont pas les seules conditions de la réussite d’un gouvernement ouvert. Comme l’a souligné Karl-Heinz LAMBERTZ (Belgique, SOC), si les processus de participation citoyenne sont désormais indispensables parce que « les seules élections ne suffisent plus », il faut s’assurer que les consultations publiques soient réellement suivies d’effet, au risque de créer sinon un grave sentiment de frustration. « Il faut être méticuleux sur le choix des sujets et des participants, et s’assurer qu’ils disposent d’une expertise suffisante, pour qu’ils puissent ensuite se retrouver dans les décisions finales », a-t-il estimé.
Par ailleurs, relevait Andrew DAWSON, (Royaume-Uni, ECR/CRE), il ne faut pas oublier que la transparence peut avoir ses limites, car certaines négociations commerciales doivent rester confidentielles dans l’intérêt même des acheteurs, y compris publics. Enfin, les jeunes délégués ont eux aussi été nombreux à prendre part aux débats : souvent issus de conseils et d’assemblées de jeunes, ils souhaitent être mieux entendus dans le cadre des procédures régionales de gouvernement ouvert, d’autant qu’ils constituent la relève de la vie démocratique européenne.
- Discours de:
- Donatella PORZI, Présidente de la Conférence des Assemblées législatives régionales européennes (CALRE) et Présidente de l’Assemblée législative de l'Ombrie, Italie
- David GOESSMANN, analyste des politiques à la Direction de la gouvernance publique de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)
- Luis PETRIKORENA ARBELAIZ, Directeur de la Démocratie Ouverte au sein de la Présidence du Gouvernement Basque, Espagne
- Interview Mediabox
- Vidéos du débat:
Donatella PORZI - David GOESSMANN - Luis PETRIKORENA ARBELAIZ
*** 36e Session du Congrès ***
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