Retour Représentation des femmes et des jeunes : comment renforcer la participation démocratique au niveau local et régional ?

Représentation des femmes et des jeunes : comment renforcer la participation démocratique au niveau local et régional ?

Rendre la démocratie locale et régionale plus inclusive, c’est d’abord augmenter la place des femmes au sein des élus, mais aussi ouvrir les assemblées à la jeunesse, et permettre à des groupes tels que les personnes handicapées, les personnes âgées ou les migrants, de s’y faire entendre et de s’y exprimer. La seconde table ronde des Assises, portant sur la participation des citoyens à la vie politique locale et régionale, a présenté plusieurs expériences répondant à ces objectifs.

Longtemps réservé aux hommes, le droit de vote s’est ouvert aux femmes, améliorant ainsi la représentativité des élus. Il faut procéder de même avec d’autres groupes peu ou mal représentés dans les assemblées, a estimé Bryony Rudkin, présidente du Comité du Congrès sur l’inclusion sociale et la dignité humaine, et conseillère municipale d’Ipswich (Royaume-Uni). Selon elle, cette diversité accrue enrayera aussi le « recul démocratique » et réduira la polarisation de la vie politique.

Membre du Parlement grec, Eirini Dourou a longtemps siégé au Congrès. Elle s’insurge contre le sexisme et la violence de genre qui règne encore dans la vie politique, et rappelle que les femmes restent sous représentées parmi les maires de nombreux pays : En Grèce, elles ne sont que 22 sur 322, une participation qui pourrait progresser, estime-t-elle, si les femmes avaient la certitude de ne pas faire l’objet de brimades ou de violences verbales et sexistes pendant les campagnes électorales ou durant leurs mandats. Il appartient selon elle aux collectivités locales de favoriser un environnement plus favorable à la participation des femmes à la vie politique.

Les jeunes doivent, eux aussi, se sentir écoutés par le monde politique et pouvoir s’y exprimer. Tobias Flessenkemper, chef du service de la jeunesse du Conseil de l’Europe, a rappelé les travaux de ce dernier pour faire abaisser, dès les années 1980, l’âge du droit de vote dans les Etats membres. Il a présenté les structures, uniques au monde, créées par le Conseil de l’Europe pour encourager la participation des jeunes, en premier lieu les deux Centres Européens de la Jeunesse de Strasbourg et de Budapest. La déléguée jeune finlandaise Maria Markkula a exprimé pour sa part son « rêve » de voir les conseils et les parlements de jeunes et d’enfants se multiplier dans tous les pays, afin que leurs voix soient partout prises en compte, et a exhorté le Congrès comme les associations nationales à oeuvrer pour la concrétisation de ce rêve.

 Une bonne organisation des élections locales favorise la participation

A côté de la représentation imparfaite des citoyens, d’autres facteur nuisent à la participation électorale, en premier lieu la croyance que les élections ne sont pas équitables ou que tout est joué d’avance. Stewart Dickson, président du Conseil pour les élections démocratiques du Conseil de l’Europe et membre de l’Assemblée régionale d’Irlande du Nord, estime que pour redonner confiance aux électeurs, les scrutins doivent être organisés de manière irréprochable, y compris sur le plan pratique. « Un résultat sera accepté, quel qu’il soit, si le vote se déroule dans la transparence », a-t-il rappelé : c’est d’ailleurs aussi pour cela que le Congrès, observe les élections locales et régionales dans tous les Etats membres, et publie ensuite des avis et des recommandations pour en améliorer le déroulement.

Lors du débat, le président de l’Association Marocaine des Présidents des Conseils des Préfectures et des Provinces, Abdelaziz Derouiche, a retracé le chemin pris par son pays pour améliorer la participation à la vie politique des femmes et des jeunes. Très rares il y a quelques années encore, les Marocaines sont de plus en plus nombreuses à siéger au sein d’assemblées élues locales. La jeune déléguée chypriote Liana Ioannides considère que la participation des femmes à la vie politique n’est toujours pas assez équilibrée, et souhaite que le rôle des femmes dans l’histoire du pays, en particulier lors de la guerre de 1974 puis dans le processus de paix, soit mieux étudié et mis en valeur.

Les associations ukrainiennes des pouvoirs locaux et régionaux ont présenté ensuite des initiatives en faveur des jeunes des régions rurales et isolées, ainsi qu’en Crimée. Pour Soeren Schumacher, président de la délégation allemande du Congrès, la mesure la plus efficace pour renforcer la participation des jeunes reste l’abaissement à 16 ans de l’âge du droit de vote. C’est déjà le cas dans plusieurs Länder, mais chaque Land définit comme il l’entend son corps électoral.

 Des élus désarmés face aux réseaux sociaux

Enfin, plusieurs interventions ont abordé l’influence des réseaux sociaux : « les jeunes font souvent plus confiance à Tik Tok qu’aux pouvoirs locaux », constatent et regrettent beaucoup d’élus. Ils souhaiteraient, à l’image d’Eirini Dourou, que le Congrès prépare « un rapport et une boîte à outils » pour les accompagner face à cette problématique complexe.

Toutefois, ajoutait Véronique Bertholle, adjointe à la Maire de Strasbourg et chargée des questions de la jeunesse au Congrès, le recours exclusif aux réseaux sociaux et le manque d’informations fiables n’est pas l’apanage de la seule jeunesse : « je tenais un bureau de vote cet été, et j’ai constaté que la moitié des électeurs ne savait pas comment voter, ni même faire la différence entre un premier et un second tour ». La preuve, comme l’ont expliqué plusieurs élus locaux présents aux Assises, qu’il est « urgent » de réhabiliter l’éducation civique dans l’enseignement, mais aussi en général.

Strasbourg, France 24 septembre 2024
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