Les villes européennes ne seront plus les mêmes après la crise de la COVID-19 et c’est tant mieux ! Comme l’a souligné Bernd Vöhringer, Président de la Chambre des pouvoirs locaux, le bilan de la pandémie permet au Congrès de remettre à jour son Manifeste pour une nouvelle urbanité tenant compte des priorités que la pandémie a mis en exergue : nouvel équilibre entre espaces urbains et ruraux dans le contexte d’une attractivité accrue des territoires proches de la nature, la mise en place d’une véritable révolution numérique de la démocratie locale, le développement rapide des villes vertes et intelligentes, mais aussi la réduction des inégalités et de la fracture numérique.
Les interventions du maire de Prague Zdenek Hrib et de Haβmersheim (Baden-Wurtemberg) Michael Salomo, ont en effet souligné l’importance des politiques vertes dans les stratégies de relance post-Covid. La crise a surtout recentré leurs priorités sur la réduction des inégalités d’accès au logement et sur la nécessité de mettre les intérêts des habitants au centre des politiques municipales. C’est le cas, par exemple, de la nouvelle politique touristique de Prague privilégiant la reprise d’un tourisme durable, économiquement et socialement viable pour les citoyens. La numérisation des services de la ville à travers un portail citoyen, mais aussi le gouvernement électronique se révèlent des enjeux de taille, notamment pour faire participer les jeunes à la vie publique. A cela il faudra rajouter la lutte contre les inégalités sociales, car comme l’a souligné Michel Salomon, « ceux qui seront laissés de côté aujourd’hui perdront foi en la démocratie de demain », notamment les PME, les jeunes, les personnes âgées qui n’ont pas le même accès au numérique, les populations défavorisées etc.
Invité au débat, Prof. Robin Hambleton, auteur de l’ouvrage « Ville et communauté au-delà de la COVID-19 : comment le leadership local peut changer l’avenir pour le meilleur », a confirmé que les stratégies post-Covid doivent gérer en parallèle, et pas de manière séparée, la complexité des défis sanitaires, économiques, écologiques et sociaux. L’importance des lieux de vie, comme centres d’attention des citoyens et des politiques, a permis de mettre en évidence le rôle indispensable des pouvoirs locaux à l’échelle démocratique. D’où le besoin de s’inspirer de modèles opérationnels tels que One city approach à Bristol (www.bristolonecity.com) où le numérique a joué un rôle important pour faire participer les volontaires dans la gestion de la crise, sans oublier la contribution essentielle de deux jeunes élus, de 17 et 18 ans, assistants au maire, qui ont réellement contribué à définir les priorités de la politique municipale en temps de crise.
Mais les politiques ambitieuses des villes qui ont géré la crise au plus près des citoyens se sont souvent heurté à des tentatives de recentralisation forcée de la part des gouvernements centraux. De nombreuses interventions de membres de la Chambre des pouvoirs locaux au débat, comme celles de Barbara Toce (Italie, SOC/G/PD), Bryony Rudkin (Royaume-Uni, SOC/G/PD), Dr Hasan Akgün (Turquie), etc., ont insisté sur la nécessité de s’assurer de l’autonomie politique et financière des villes qui devraient avoir un accès plus direct aux aides de relance de l’UE.
La problématique de la décentralisation en arrêt a été reprise, de manière encore plus saillante, par les responsables des régions lors du débat de 16 juin sur le rôle des régions pour garantir une réponse adéquate à la pandémie.
Particulièrement touchées en raison de leurs domaines de compétences prédominants : secteurs de l’économie, sanitaire, du transport, de l’environnement, des zones transfrontalières, ou encore de l’organisation des élections régionales et locales, les régions ont souvent fait face à une incompréhension de l’administration des Etats. « Les régions se sont trouvées entre le marteau et l’enclume, entre les gouvernements centraux et les citoyens mécontents ! », a regretté Karl-Heinz Lambertz, Président de l’Association des régions frontalières d’Europe (ARFE). Les décisions précipitées de beaucoup de gouvernements à fermer les frontières, sans tenir compte des économies transfrontalières, ont été, d’après lui, de très graves erreurs qui risquent de générer des conséquences négatives à long terme pour les économies locales, mais aussi pour l’entente entre les citoyens frontaliers. D’après lui, le Congrès devrait jouer un rôle crucial dans la construction rapide des régions transfrontalière intégrées de 3ème génération afin de prévenir l’effondrement des acquis démocratiques. Pour défendre ces derniers, il ne faudra pas hésiter à recourir même à des procédures judiciaires, a insisté Rohr Reinhart, Président du Parlement de la région de Carinthie en Autriche, tirant la sonnette d’alarme sur une menace réelle de la démocratie en Europe.
« Transformer la crise en opportunité pour faire mieux qu’avant ! », voilà sur quoi a insisté à son tour Magnus Berntsson, Président de l’Assemblée des régions d’Europe (ARE), membre du CPLR. S’appuyer sur l’optimisme de la relance pour mettre en place des solutions qui se sont révélées efficaces au niveau régional serait d’après lui le meilleur gage pour réussir la suite. Il a notamment cité le plan de relance économique de la Catalogne qui lutte activement contre les inégalités sociales, la Maison de la numérisation en basse Autriche qui a mis en réseau les entreprises et l’administration publique pour mieux gérer la crise, tout comme l’association des entreprises et de la société civile dans les politiques régionales en temps de pandémie en Suède.
Enfin, Gustavo Matos Exposito, Président de la Conférence des Assemblées législatives des régions d’Europe (CALRE), a mis l’accent sur le renforcement par les régions des services publics, notamment en matière de santé. « Connexions nerveuses » qui donnent corps au projet européen, les autorités locales et régionales doivent, d’après lui, voir leurs compétences s’élargir, notamment dans la mise en œuvre des textes législatifs européens en matière de redressement économique post-Covid.
Les débats ont donc vivement recommandé la mise en place d’une gouvernance multi-niveaux plus efficace qui puisse réellement assurer le principe de subsidiarité et le respect de la Charte de l’autonomie locale et régionale du Congrès. La participation des jeunes à la vie démocratique locale et régionale a été illustrée notamment par les contributions des délégués jeunes Léa Hatt (Suisse), Vadim Kuznetsov (Russie), Krystyna Bragiel (Pologne) et Winckel Elisha (Luxembourg).
*** 40ème Session du Congrès (2ème partie) ***
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