La visite s'est concentrée sur le traitement et les conditions de détention des ressortissants étrangers retenus dans quatre centres fermés de pré-renvoi (Centri di permanenza per il rimpatrio ou CPR) à Milan, Gradisca, Potenza et Rome.
Le CPT a identifié plusieurs cas d'allégations de mauvais traitements physiques et d'usage excessif de la force par des policiers à l'encontre de ressortissants étrangers retenus dans les CPR visités, généralement à la suite de troubles ou d'actes de vandalisme dans les centres. Le rapport souligne l’absence d’un contrôle rigoureux et indépendant de ces interventions de police ainsi que l’absence d’enregistrement précis des blessures subies par les personnes retenues et d’évaluation de leur origine.
Le Comité critique également la pratique répandue de l’administration de médicaments psychotropes non prescrits dilués dans de l’eau à des ressortissants étrangers, telle que documentée au CPR de Potenza. Le fait de transporter des ressortissants étrangers vers un CPR menottés dans un véhicule de police sans leur offrir de nourriture et d’eau pendant des trajets de plusieurs heures devrait être réexaminé.
Plus généralement, le Comité est très critique à l'égard de l’architecture et des dispositions matérielles des CPR, en particulier de l'environnement carcéral, qui pourrait être considéré comme similaire à celui observé par le Comité dans les unités de détention de haute sécurité pour personnes condamnées . Parmi les exemples de ces éléments, on peut citer les grillages à triple maille métallique sur les fenêtres et les cours extérieures en forme de cage. D'autres lacunes identifiées concernent la mauvaise qualité de la nourriture fournie aux personnes détenues et le manque de stocks d'articles de toilette.
En ce qui concerne le régime d’activités proposées, les ressortissants étrangers sont laissés à l’abandon dans les CPR, les contractants des CPR concernés n'investissant qu’au minimum pour proposer quelques activités intéressantes. Le cahier des charges pertinent (Capitolato) n’était pas respecté, et le CPT a noté que plusieurs enquêtes pénales étaient ouvertes à l'encontre de la direction de plusieurs CPR.
Le CPT a eu la nette impression que le taux élevé d'événements critiques et de violence enregistrés au sein des CPR était une conséquence directe des restrictions de sécurité disproportionnées, de l'absence d'évaluation des risques individuels des ressortissants étrangers combinées au manque d’activités offertes. Le Comité préconise l’introduction d’une gamme complète d’activités constructives, en particulier à la lumière de l’extension de la période de détention pouvant aller jusqu’à 18 mois.
En ce qui concerne les soins de santé, le système actuel de médecins généralistes attestant qu'une personne est apte à être détenue dans un CPR devrait être revu, afin de s'assurer que des médecins ayant une expérience et une connaissance préalables des conditions de détention en milieu fermé soient impliqués. Le CPT considère également que l'examen médical des personnes détenues lors de leur admission devrait être renforcé.
L’approche actuelle selon laquelle divers services répressifs, notamment des groupes anti-émeutes et d’intervention, assurent par rotation la surveillance des CPR n’est pas appropriée. De l'avis du CPT, il est nécessaire de créer un corps spécialisé d'agents de détention convenablement formés aux défis spécifiques de la surveillance des personnes placées dans des centres de rétention pour migrants, en particulier en ce qui concerne les compétences interpersonnelles et la capacité à reconnaître les symptômes d'éventuelles réactions de stress.
En matière de garanties juridiques accordées aux personnes soumises à un trattenimento dans un CPR, le CPT recommande d'améliorer l'accès à un avocat. En outre, les ressortissants étrangers retenus dans ce que l'on appelle les locali idonei - zones de détention de la Direction générale de la police nationale (Questure) dans les ports, les aéroports et les postes frontières -, devraient bénéficier des garanties nécessaires telles que l'information sur leurs droits, l'accès à un avocat et la notification de leur rétention à un tiers.
Le rapport conclut que les constatations du CPT, notamment en ce qui concerne les très mauvaises conditions matérielles, l'absence de régime d'activités, l'approche sécuritaire disproportionnée, la qualité variable des soins de santé et le manque de transparence de la gestion des CPR par des sociétés privés, remettent en question l'application d'un tel modèle par l'Italie dans un cadre extraterritorial, tel que l'Albanie.
Dans leur réponse, les autorités italiennes fournissent des informations détaillées sur le fonctionnement des efforts extraterritoriaux visant à détenir les migrants dans des centres situés sur le territoire albanais, avec une référence particulière à l'évaluation de leur vulnérabilité. En outre, les autorités italiennes indiquent que les cas de mauvais traitements physiques décrits dans le rapport n'ont pas fait l'objet d'enquêtes pénales et que plusieurs inspections ont été menées par les autorités sanitaires au CPR de Potenza en ce qui concerne la pratique de la sur-médication prétendument généralisée des personnes retenues. Des informations détaillées sont également fournies sur la conception et l'aménagement des CPR et certains éléments carcéraux et de sécurité sont justifiés à la lumière du taux élevé de vandalisme de la part de la population retenue. La réponse contient également des informations sur les inspections menées par le ministère de l'Intérieur dans divers CPR afin de vérifier les normes relatives aux conditions matérielles et aux niveaux de personnel. Enfin, il est fait référence à la publication d'un nouveau cahier des charges (Capitolato) pour la gestion des CPR.
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- Lire le résumé du rapport (en anglais, en italien)
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- Le CPT et l’Italie