En ce qui concerne les établissements de police, bien que la majorité des personnes rencontrées n’ait fait état d’aucun mauvais traitement physique, plusieurs personnes ont indiqué avoir reçu des coups volontaires lors de leur interpellation ou au sein des locaux de police. Des allégations d’insultes, y compris à caractère raciste ou homophobe, ont également été recueillies ainsi que des menaces proférées avec arme.
Le CPT recommande de rappeler que l’usage de la force devrait être strictement nécessaire et que des mesures devraient être prises pour renforcer la lutte contre l’impunité.
Il est aussi nécessaire d’améliorer la qualité de la notification des droits et l’accès effectif à un avocat en toutes circonstances.
De manière générale, le CPT est extrêmement préoccupé par les conditions matérielles de détention dans certains locaux de police visités.
En ce qui concerne les prisons, le CPT constate depuis 1991 que les maisons d’arrêt sont surpeuplées, avec des taux d’occupation dépassant parfois les 200 %. Au moment de la visite, près de 1 500 personnes détenues dormaient sur un matelas posé au sol.
Le CPT appelle les autorités françaises à prendre des mesures urgentes pour que chaque personne dispose d’un lit et d’au moins 4 m² d’espace de vie en cellule collective, à adopter une stratégie globale destinée à réduire la population carcérale et à prévenir la violence entre personnes détenues.
En matière de conditions matérielles (conditions d’incarcération, offre d’activités), le CPT constate un grand contraste entre les établissements visités. Dans les quartiers disciplinaires et d’isolement, les cellules étaient souvent mal isolées, manquaient de lumière naturelle et les cours de promenade étaient trop petites et sous-équipées.
Le Comité continue d’être préoccupé par le placement à l’isolement de personnes détenues pour des durées prolongées, dépassant parfois plusieurs années, en raison de son impact sur la santé mentale.
Le CPT considère qu’il est inacceptable que des personnes souffrant de troubles psychiatriques sévères demeurent détenues en prison faute d’être transférées dans des structures de soins adéquates. La prise en charge en unités hospitalières spécialement adaptées marque une avancée mais les places au sein de ces structures restent insuffisantes. De plus, le Comité déplore à nouveau que le transfert et les soins prodigués aux personnes détenues en milieu hospitalier continuent d’être le plus souvent pratiqués dans des conditions inadmissibles : recours quasi-systématique aux entraves et présence fréquente du personnel d’escorte lors des consultations.
En ce qui concerne la psychiatrie, le CPT s’est rendu au Centre hospitalier de Cadillac où la très grande majorité des patients avec qui la délégation s’est entretenue a estimé que les soignants les traitaient correctement, malgré un manque ressenti de temps et de disponibilité.
Un petit nombre de patients s’est néanmoins plaint d’avoir fait l’objet d’abus de langage, ainsi que d’un usage excessif de la force, le plus souvent à l’occasion d’immobilisations ou de placements en chambre d’isolement, visant à maîtriser un patient agité.
Le CPT regrette que le recours à la force, qui peut parfois se justifier, n’était pas systématiquement répertorié et quand il l’était, les données ne permettaient pas de démontrer en quoi celui-ci s’était avéré strictement nécessaire et appliqué dans le respect du principe de proportionnalité.
Les conditions de vie matérielles au sein de l’établissement étaient extrêmement disparates selon les unités, les plus vétustes n’offrant que peu ou pas d’intimité aux patients, pour le repos ou la toilette notamment. Les unités fermées de psychiatrie générale souffraient d’un manque de lits et d’une suroccupation régulière. Le CPT appelle les autorités à assurer, dans l’ensemble des unités, des conditions de séjour décentes, ainsi qu’un nombre adéquat de lits en psychiatrie générale.
Enfin, le Comité reste préoccupé du fait que le placement de patients en chambre d’isolement demeurait fréquent, voire systématique et était souvent perçu par les patients comme une forme de punition. La surveillance des patients sujets à des mesures d’isolement et de contention restait largement insuffisante, tandis que leur durée était excessive et/ou insuffisamment justifiée dans les dossiers.
Au cours de cette visite, le CPT a visité 12 établissements des forces de l’ordre (police et gendarmerie), quatre établissements pénitentiaires (Bordeaux-Gradignan, Lille-Sequedin, Maubeuge et Vendin-le-Vieil), un établissement de soins psychiatriques (pôle médico-légal du Centre hospitalier de Cadillac). Malgré une bonne coopération avec les autorités françaises, le CPT a néanmoins rencontré des difficultés pour accéder à des données médicales et à des procès-verbaux d’audition indispensables à l’accomplissement de sa mission.
Par ailleurs, le Comité anti-torture publie un deuxième rapport relatif à une visite ad hoc, en juillet 2020, dans des lieux de détention à Strasbourg (prison, palais de justice, hôpital civil, centre de rétention de Geispolsheim, commissariats de Strasbourg et de Haguenau, gendarmeries), qui a permis de constater les effets des mesures sanitaires prises dans le contexte de la pandémie de covid-19.
Dans l’ensemble, les mesures pertinentes ont été prises pour protéger les agents et les personnes privées de liberté, mais la prise en charge de ces dernières peut encore être améliorée.