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Crédits photos : 100 bâtiments/100 récits ©HERMeS NGO

Crédits photos : 100 bâtiments/100 récits ©HERMeS NGO

Localisation de l’initiative :

 Cyclades/Île de Syros (GRÈCE)


Initiateur

Association, communauté, pouvoirs locaux/régionaux


Lien avec les recommandations de la Stratégie 21 :

S2 - Rendre le patrimoine plus accessible


Période :

Date de début : 1/4/2018

Date de fin : 30/4/2019 (date de fin officielle). Cependant, les activités sont toujours en cours aujourd’hui avec le soutien de la communauté.


Motivation / Méthodologie

Cette initiative a pour objectif de combler l’absence de lien entre le patrimoine matériel et immatériel d’une ville grâce au déploiement de services patrimoniaux numériques, innovants et prêts à l’emploi, à l’intention des citoyens et des parties prenantes. Le défi consiste à sensibiliser les citoyens à la vulnérabilité de leur patrimoine bâti et à les encourager à partager, par l’utilisation d’un outil numérique (il s’agit là du concept de « crowd-sharing »), leurs récits personnels sur certains bâtiments. Ainsi, la dimension immatérielle du patrimoine culturel de la ville peut être préservée et réutilisée de manière créative pour présenter la mémoire collective de la ville, en harmonie avec son patrimoine architectural.

Après la création d’un système numérique d’enregistrement et de gestion de la préservation (HER.M.eS.) sous la forme d’un portail regroupant les bâtiments historiques d’Hermoupolis, notre but à présent est de le rendre durable, en l’intégrant à un outil plus accessible pouvant également englober des qualités immatérielles. Nous sommes partis du principe que les citoyens, en tant qu’ambassadeurs de cette initiative, pouvaient apporter la dimension qualitative nécessaire : les récits. Le fait de raconter, partager et recréer les histoires de la ville peut susciter un sentiment d’appartenance parmi les citoyens et les sensibiliser à la fragilité de leur patrimoine. De plus, en prenant conscience de leur patrimoine et du sentiment qu’ils appartiennent à cette ville, ils deviennent capables de se faire leur propre idée d’un plan de gestion de sa conservation pour l’avenir.

Dans cette optique, nous avons lancé notre initiative « 100 bâtiments/100 récits » ; chacune des histoires racontées par les citoyens est liée à un bâtiment. Une fois le récit enregistré, il est associé à un bâtiment sur lequel va être placé un code QR. Ce code dirige les utilisateurs, via leurs téléphones portables, vers une page en ligne réactive qui présente l’histoire et le bâtiment sous la forme d’informations textuelles et audiovisuelles.

L’initiative a été lauréate du concours des « Récits sur le patrimoine européen ». Après l’obtention de cette récompense, nous avons d’abord suivi une stratégie de communication type, puis commencé à diffuser la nouvelle sur les médias sociaux et dans la presse locale. Afin de mieux nous faire entendre, nous avons créé une courte vidéo promotionnelle et un spot radio pour attirer l’attention sur les bâtiments de la ville en danger et sur la possibilité de les conserver en « parlant à travers eux » et en partageant leur histoire.

Afin de commencer à partager et publier les récits des citoyens, nous avons élaboré un formulaire en ligne. Ce formulaire facile d’accès demande à l’utilisateur : soit a) de partager une histoire, soit b) de proposer un bâtiment de la ville qui mériterait de figurer dans la liste des 100 bâtiments, soit c) de faire les deux. Il fournit également un espace de données pour charger des photos ou des vidéos. Ainsi, l’équipe a commencé à enregistrer des récits, à les numériser, à les réorganiser et à les héberger sur des pages réactives via strikingly.com. Nous avons également fait participer des établissements d’enseignement locaux et organisé des réunions et des séminaires formels et informels avec leurs enseignants. Afin de mieux expliquer notre méthodologie, nous avons créé une boîte à outils numérique destinée aux enseignants. Les conseils et les instructions de base qu’elle contient leur permettent de rechercher des récits et de créer de manière uniforme des contenus vidéo, audio ou des podcasts, etc., avec leurs élèves.

Afin de renforcer la visibilité du projet, nous avons organisé un événement social sous la forme d’un festival culturel qui s’est déroulé dans le théâtre historique. Cet événement était axé sur l’éducation et la jeunesse, et leur contribution à l’étude du patrimoine culturel européen et local et à la diffusion des connaissances en la matière. Nous avons réuni dix actions pertinentes qui avaient déjà été menées par des institutions culturelles, des établissements d’enseignement publics et l’université locale sous l’égide de la dernière « Année européenne du patrimoine culturel ». Avec leurs représentants, nous avons commencé à produire de courtes vidéos qui racontent et présentent ces actions. Toutes ces actions ont servi de modèles ; les autres citoyens les ont reproduites et suivies en vue de valoriser le patrimoine culturel local.

Dans le cadre de ce projet, les récits n’ont pas besoin d’être « anciens » ou de se référer exclusivement au passé. Les bâtiments peuvent combiner présent et passé, moderne et classique, de manière formidablement créative.


Obstacles / Barrières

L’un des principaux obstacles auxquels nous avons dû faire face a été d’obtenir, auprès du service compétent du ministère de la Culture, l’autorisation de placer les codes QR sur les bâtiments, notamment les bâtiments publics. Il s’agit d’une procédure très longue qui doit être appliquée à la lettre pour que la demande soit acceptée.

Le formulaire en ligne, que nous avons créé pour que les citoyens commencent à partager et publier leurs récits, a soulevé une autre difficulté. Nous savions pertinemment que ce format ne conviendrait pas aux personnes âgées ou peu intéressées par la technologie. Pour résoudre ce problème, nous nous sommes réunis plusieurs fois, en particulier après le festival culturel au théâtre. Pendant l’événement, nous disposions d’un stand d’information où nous pouvions informer les personnes âgées sur la manière de nous contacter et de partager des récits avec nous en personne.


Changement / Impact

Grâce à l’événement culturel organisé au théâtre historique de la ville, l’initiative a considérablement accru sa visibilité et de plus en plus de gens ont commencé à nous contacter et à nous demander où et comment ils pouvaient participer à la mémoire urbaine d’Hermoupolis.

L’un des principaux aboutissements de ce projet est la participation active des professeurs et enseignants des établissements d’enseignement locaux. Avec leurs élèves, ils ont « adopté » des bâtiments historiques d’une grande valeur architecturale et créé un sujet (vidéo, contenu audio ou encore collage ou peinture) sous la forme de discours ou de récits sur les bâtiments. À travers cette activité, les enseignants et les élèves ont appris à mieux connaître et apprécier le patrimoine bâti de leur ville, les événements de l’histoire grecque et européenne liés aux bâtiments et à leurs propriétaires, ainsi que la vie des habitants ordinaires de cette ville qui, si elle fut faste et prospère, a également connu le déclin et la décadence. Par ailleurs, l’obligation de créer des récits au format numérique afin qu’ils soient hébergés sur des pages réactives améliore les compétences numériques des enseignants et des élèves. Ces activités sont permanentes, et nous avons la joie de les inscrire au programme de chaque année scolaire.

En outre, notre réseau actuel d’institutions culturelles et d’ONG locales et nationales se développe, intégrant toujours plus de partenaires européens. Les institutions culturelles internationales menant des actions similaires ont été informées de l’initiative « 100 bâtiments/100 récits ». Elles sont depuis en étroite communication avec notre ONG dans le but d’établir une collaboration, soit dans le cadre des projets H2020 soit lors de séminaires coorganisés sur notre île. Nous nous réjouissons de ces collaborations potentielles et de leurs bénéfices pour l’économie locale et le tourisme.

Enfin, nous avons procédé à notre première évaluation formatrice de l’application numérique finale. Nous avons analysé les codes QR placés sur les 12 premiers bâtiments, afin de voir comment l’application était reçue par les utilisateurs/les citoyens et d’évaluer leur curiosité à scanner les codes QR tout en se promenant dans la ville avec ou sans guide.

En raison des conditions météorologiques et de la saison actuelle sur l’île (l’hiver), il nous a été impossible de trouver des visiteurs ou des touristes pour évaluer l’application. Néanmoins, nous considérons actuellement les habitants d’Hermoupolis non originaires de Syros comme des visiteurs de la ville, qui continuent à découvrir son patrimoine culturel. Ainsi, nous avons décidé d’organiser un tour du patrimoine classique dans le centre-ville, où tous les styles architecturaux d’Hermoupolis peuvent être identifiés par ordre chronologique. Cette promenade, qui dure environ 1 h 30, révèle l’histoire de la ville. Aux fins de l’évaluation, nous avons utilisé des observations qualitatives et un formulaire en ligne. Nous avons observé trois groupes de participants, parmi lesquels un groupe d’enseignants en maternelle qui a participé à un séminaire formel intitulé « Découvrir ma ville : Hermoupolis ; chaque bâtiment raconte une histoire ». Dans l’ensemble, les résultats de ce processus d’évaluation ont mis en avant quelques problèmes concernant l’interaction opportuniste et la volonté des utilisateurs à interagir avec le code QR. L’application est probablement plus utile pour les visiteurs étrangers, qui disposent à la fois du temps et des outils portables nécessaires pour accéder au contenu (applications qui scannent les codes QR, données mobiles). Étant donné que le projet est toujours en cours, nous prévoyons une autre évaluation au printemps ou en été lorsque la population locale et les visiteurs/touristes pourront se promener dans la ville et prendre plus de temps pour découvrir les récits.


Enseignements tirés

Cette initiative présente une étude de cas dans laquelle un système numérique efficace (récompensé par le Prix Europa Nostra) de gestion de la préservation du patrimoine bâti (HER.M.eS.) est enrichi de fonctionnalités innovantes prêtes à l’emploi permettant d’héberger des récits partagés par les citoyens. HER.M.eS. est déjà utilisé dans d’autres villes historiques des îles grecques (Corfou, Samos, Lesvos, Chios, Tinos), ainsi qu’en Albanie (Gjirokastër) et en Macédoine du Nord (Ohrid). Par conséquent, il est fort possible que les pouvoirs publics étendent ce premier système numérique de gestion de la préservation du patrimoine bâti aux aspects du patrimoine immatériel, tels que les histoires des bâtiments et de leurs habitants. D’une part, ce système peut être considéré comme une autre pratique visant à mieux préserver l’histoire de la ville. D’autre part, il rapproche les citoyens, non seulement les uns des autres mais aussi de leur ville, leur permettant de mieux apprécier et de protéger de manière plus responsable leur patrimoine culturel.

Afin d’informer les autres villes sur la façon de développer un système numérique de gestion de la préservation du patrimoine bâti, mais aussi de susciter l’attention des citoyens à l’aide de pratiques et d’événements visant à promouvoir la participation civique, nous devons tenir compte de nos derniers résultats et renforcer notre résilience dans le cadre de l’initiative actuelle.


Ressources en ligne


Coordonnées

Contact : Chatzigrigoriou Pavlos
Organisation : ONG HERMeS et Institut Syros
E-mail : pc@hermesngo.org
Téléphone : +306974424174
Site internet : www.hermesngo.org; www.syrosinstitute.eu


Source de financement

Financement : Récits sur le patrimoine européen, Europe in my region, fonds régionaux de l’UE, fonds privés (Institut Syros).