Retour Conséquences de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine, bilan mitigé pour les droits des personnes LGBTI, antitsiganisme et réduction de l’espace dévolu à la société civile – L’ECRI présente les principales tendances en 2022

Conséquences de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine, bilan mitigé pour les droits des personnes LGBTI, antitsiganisme et réduction de l’espace dévolu à la société civile – L’ECRI présente les principales tendances en 2022

La confrontation aux défis posés par la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine, la lutte contre la discrimination toujours présente - malgré quelques progrès - des personnes LGBTI, des Roms et des Gens du voyage, et la nécessité de soutenir les acteurs de la société civile, tels ont été les principaux groupes d’enjeux thématiques auxquels la société et les gouvernements européens ont fait face l’année dernière, a indiqué la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) dans son rapport annuel relatif à l’année 2022 publié aujourd’hui.

La guerre d’agression lancée par la Russie (*) contre l’Ukraine a été précédée, et s’accompagne encore, d’un discours et d’une propagande ultranationalistes. Selon l’ECRI, le récit mensonger des dirigeants russes, au plus haut niveau politique, décrivant le Gouvernement ukrainien démocratiquement élu et les Ukrainiens qui ne se considèrent pas comme « pro-russes » comme des néonazis était absurde, nauséabond et souillait la mémoire des millions de victimes du nazisme.

Les flux migratoires en provenance d’Ukraine à la suite de la guerre, d’une ampleur inégalée depuis la Seconde Guerre mondiale, ont posé des défis sans précédent aux sociétés et aux États européens. « Malgré l’accueil globalement satisfaisant que les pays ont réservé aux personnes fuyant l’Ukraine, les conditions de protection <…> ont varié en fonction de la nationalité des personnes », indique le rapport de l’ECRI. Des inégalités de traitement ont été signalées à l’égard des non-Ukrainiens, tels que les personnes originaires de pays asiatiques ou africains, aux frontières de l’Ukraine, ainsi que dans les pays d’accueil, les conditions de protection semblant être « d’un niveau bien inférieur ». De plus, des inégalités de traitement liées à l’appartenance ethnique ont été observées, par exemple en ce qui concerne les Roms de nationalité ukrainienne. L’ECRI réaffirme son souhait de voir ces signalements faire l’objet d’une enquête efficace. Elle félicite les autorités, les organismes de promotion de l’égalité et les acteurs de la société civile de toute l’Europe pour leur solidarité qui, comme elle le souligne, devrait rester « la nouvelle normalité » dans la gestion des crises humanitaires actuelles et futures.

La guerre de la Russie contre l’Ukraine a également conduit des centaines de milliers de citoyens russes à quitter leur pays et à s’installer dans des États membres du Conseil de l’Europe où ils n’avaient pas besoin de visa d’entrée. L’ECRI constate avec satisfaction que les autorités des pays d’accueil et les organismes de promotion de l’égalité sont intervenus rapidement pour dissiper les premières manifestations de cette hostilité et les discours de haine qui pouvaient y être associés, mais souligne la nécessité d’être extrêmement vigilant dans ce domaine.

Le deuxième groupe d’enjeux recensés par l’ECRI en 2022 était lié à la situation des personnes LGBTI en Europe qui reste très inégale. Dans un registre positif, certains pays ont permis aux couples de même sexe de vivre dans le cadre d’un partenariat enregistré ou d’adopter des enfants, et ont introduit des interdictions légales concernant les « thérapies de conversion » et les pratiques de « normalisation » de l’organe sexuel. Cependant, le nombre de pays interdisant ces pratiques est encore faible, et l’ECRI encourage leur mise en place. Les personnes LGBTI et les défenseurs de leurs droits ont continué d’avoir le plus grand mal à exercer leurs droits à la liberté d’expression et de réunion. Certains pays ont élaboré des projets visant à définir le mariage comme un acte possible uniquement entre un homme et une femme, ou à inscrire dans leurs Constitutions l’interdiction d’adopter pour les couples de même sexe. L’existence même des personnes LGBTI est considérée comme tabou dans plusieurs pays européens. Les discours de haine LGBTIphobes de la part de responsables politiques et les attaques contre des personnes LGBTI viennent cruellement rappeler que l’Europe a encore beaucoup à faire pour prévenir et combattre la discrimination, les discours de haine et la violence motivée par la haine contre les personnes LGBTI. En 2023, l’ECRI s’est engagée à adopter une nouvelle recommandation de politique générale sur l’intolérance et la discrimination à l’égard des personnes LGBTI.

L’antitsiganisme et les discours de haine visant les Roms continuent de sévir en Europe, tout comme la discrimination envers les Roms et les Gens du voyage, indique le rapport de l’ECRI. Les Roms continuent d’être dépeints de manière négative dans les médias, la ségrégation scolaire des enfants roms est toujours d’actualité, leurs conditions de logement sont déplorables dans de nombreux pays européens, et les mesures prises pour améliorer la situation sont insuffisantes. « Malheureusement, les expulsions de Roms de logements construits de manière irrégulière sont restées `populaires´ auprès des électeurs de nombreux pays européens, ce qui a incité les autorités locales à se montrer disposées à procéder à de telles expulsions, sans garanties appropriées », note l’ECRI.

Parallèlement, l’ECRI a observé des progrès dans certains pays en ce qui concerne l’indemnisation des Roms pour les torts qu’ils ont subis dans le passé sous forme de stérilisations illégales et souvent forcées, et pour les exactions commises par la police. Toutefois, les violences policières racistes contre les Roms restent un problème, et l’ECRI considère qu’« il est grand temps de prendre des mesures efficaces pour encourager les Roms et les témoins d’exactions policières à se manifester, leur apporter un soutien approprié et veiller à ce que la police rende mieux compte de ses actes ». Les États devraient faire des efforts supplémentaires pour organiser des formations policières, recruter des médiateurs parmi les Roms et les policiers, ainsi que des policiers roms.

Enfin, dans son rapport annuel, l’ECRI déplore le rétrécissement de l’espace dans lequel les acteurs de la société civile peuvent agir dans certains pays, et les ingérences injustifiées des autorités auxquelles ils sont confrontés. Les procédures d’enregistrement des ONG ont été alourdies, des taxes supplémentaires et des amendes administratives injustifiées ont été imposées, et la réglementation sur les financements étrangers a été renforcée. Des cas de stigmatisation et d’intimidation d’acteurs de la société civile par des responsables politiques et gouvernementaux ont été signalés. Le fait que tous les motifs protégés, tels que la religion, l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, ne figurent pas dans la législation sur les discours et les crimes de haine empêche pratiquement les acteurs de la société civile de se défendre. « Un espace ouvert et démocratique devrait être garanti pour ces organisations » conclut l’ECRI.

----------------
(*) L’ECRI n’est pas en mesure d’examiner les discours de haine ni les autres questions relevant de son mandat dans les territoires temporairement occupés et les autres régions des États membres du Conseil de l’Europe qui sont sous le contrôle effectif de la Fédération de Russie. Le suivi de la Fédération de Russie par l’ECRI a pris fin en mars 2022, après l’exclusion de la Russie du Conseil de l’Europe.

 

 

Strasbourg 1er juin 2023
  • Diminuer la taille du texte
  • Augmenter la taille du texte
  • Imprimer la page


 

accès restreint

 Accès membres

 Réinitialisation du mot de passe (expiration tous les 6 mois)

e-news