Söyler c. Turquie  | 2014

Fin de la privation du droit de vote pour certaines catégories de détenus

Cette affaire illustre le fait que si un parlement national peut restreindre le droit de vote d'un détenu, cette restriction ne saurait être automatique et devrait permettre une marge d'appréciation.

Commentaire formulé par le Human Rights Law Centre à propos de l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme

Contexte

Un homme d'affaires incarcéré soutenait que le fait d'interdire aux détenus de voter aux élections constituait une violation de la Convention européenne des droits de l'homme.

Ahmet Söyler a constaté qu'il était toujours légalement inscrit sur les listes électorales peu de temps après avoir commencé à purger une peine d'emprisonnement de près de cinq ans pour un délit financier.

Tout en pensant que son inscription sur les listes électorales était peut-être due à une erreur, Ahmet Söyler s’est adressé aux autorités électorales pour leur demander de l'autoriser à voter lors des élections générales turques de 2007. Il a cité à cet effet la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme sur le droit de vote des détenus.

Les autorités lui ont cependant répondu que la législation turque ne lui permettait pas de voter.

Il n'a donc pas pu participer aux élections.

Bien qu'il ait bénéficié d'une libération conditionnelle en 2009 pour bonne conduite, Ahmet Söyler n'a pas été autorisé à voter jusqu'à la date officielle de la fin de sa peine, en 2012. Il n'a donc pas non plus été en mesure de participer aux élections de 2011.

Arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme

La Cour européenne a jugé que l'application « automatique et indifférenciée » de la privation du droit de vote en Turquie constituait une violation des droits électoraux d'Ahmet Söyler.

Elle a considéré que les restrictions imposées en Turquie au droit de vote des personnes condamnées à une peine de prison sont « d’une portée et d’un impact plus importants » que celles d’autres pays que la Cour a examinées.

La Cour a également estimé que la privation du droit de vote ne tenait pas compte d'éléments tels que la nature ou la gravité de l'infraction commise, la durée de la peine d'emprisonnement ou la conduite ou la situation du détenu.

Selon la Cour, l'affaire d'Ahmet Söyler « illustre l'application indifférenciée de la restriction », notamment parce qu'il a été condamné pour une infraction relativement mineure qui n'est plus passible d'une peine d'emprisonnement en Turquie.

Suites

En 2015, la Cour constitutionnelle turque a jugé illégales certaines restrictions imposées par le code pénal turc au droit de vote des détenus.

En 2015 et 2018, les autorités électorales turques ont décidé d'autoriser certaines catégories de détenus, notamment les personnes placées en détention provisoire ou qui bénéficient d'une libération conditionnelle, à voter lors des élections générales.

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