Retour Hongrie - Avis sur les amendements constitutionnels adoptés par le parlement de la Hongrie en décembre 2020

1035/2021

Demandé par : l'Assemblée parlementaire, Commission de monitoring

Mesures recommandées : 85. La Commission de Venise souhaite formuler les principales recommandations suivantes : a. En ce qui concerne l'amendement à l'article L paragraphe (1) de la Loi fondamentale (concernant le mariage comme l'union d'un homme et d'une femme, et l'ajout de "La mère est une femme, le père est un homme"), sa compatibilité avec l'article 8 de la CEDH (droit au respect de la vie privée et familiale) et l'article 14 (interdiction de la discrimination) pris conjointement avec l'article 8 de la CEDH dépend principalement du fait que la loi hongroise autorise (1) les adoptions par des couples non mariés de sexe opposé ou (2) les adoptions par des parents hétérosexuels célibataires. Si tel n'est pas le cas, aucune violation de la CEDH ne peut être constatée, du moins pas au regard de la jurisprudence actuelle de la Cour européenne des droits de l'homme. Toutefois, des problèmes concernant l'interdiction de la discrimination en vertu de la CEDH se poseraient si la Hongrie autorisait, dans son droit de la famille, les adoptions par des parents célibataires, mais uniquement hétérosexuels, ou les adoptions par des couples non mariés, mais uniquement hétérosexuels. Cet amendement constitutionnel ne devrait pas être utilisé comme une opportunité pour retirer les lois existantes sur la protection des individus qui ne sont pas hétérosexuels, ou pour modifier ces lois à leur désavantage. b. En ce qui concerne la prérogative du ministre des affaires familiales de donner ou de refuser un consentement pour les adoptions de personnes célibataires, la Commission recommande que l'interprétation et l'application des amendements constitutionnels, notamment lors de la rédaction de la législation d'application, soient effectuées de manière à ce que le principe de non-discrimination pour tous les motifs, y compris sur la base de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre, soit pleinement mis en œuvre. Pour ce faire, des critères clairs doivent être établis, limitant le pouvoir discrétionnaire du ministre. c. L'amendement "La Hongrie protège le droit des enfants à une identité propre correspondant à leur sexe à la naissance" devrait être abrogé ou modifié afin de garantir qu'il n'ait pas pour effet de nier les droits des personnes transgenres à la reconnaissance légale de leur identité de genre acquise. Elle recommande également que le système d'enregistrement des naissances et de reconnaissance légale de l'identité de genre soit conforme aux exigences de non-discrimination du droit international des droits de l'homme et des normes hongroises applicables en matière de non-discrimination, qui doivent être appliquées de manière stricte en ce qui concerne en particulier le droit des personnes transgenres à la reconnaissance juridique de leur identité de genre acquise et la situation complexe des enfants intersexués. d. L'amendement "La Hongrie [...] assure aux [enfants] une éducation conforme aux valeurs fondées sur l'identité constitutionnelle et la culture chrétienne de notre pays" ne peut être considéré comme conforme aux normes européennes que si les principes constitutionnels et les lois sur l'éducation sont effectivement mis en œuvre. Pour ce faire, le système scolaire public doit offrir un programme objectif et pluraliste, en évitant l'endoctrinement et la discrimination pour tous les motifs et en respectant les convictions des parents et leur liberté de choisir entre des cours religieux et non religieux. e. L'article 7 du neuvième amendement relatif à l'article 38 de la Constitution et introduisant dans la loi fondamentale les "fondations de gestion d'actifs d'intérêt public exerçant des fonctions publiques » devrait être reconsidéré ; ces fondations devraient plutôt être régies par une loi statutaire, énonçant clairement toutes les obligations pertinentes de transparence et de responsabilité pour la gestion de leurs fonds (publics et privés), ainsi que des garanties d'indépendance appropriées pour la composition et le fonctionnement du conseil d'administration. Ces lois devraient tenir compte du rôle important des universités en tant que lieux de libre pensée et d'argumentation, en prévoyant toutes les mesures nécessaires pour garantir la sauvegarde appropriée de l'indépendance académique et de l'autonomie institutionnelle. f. Les articles 6 et 9, et 11 du neuvième amendement modifiant la Loi fondamentale de la Hongrie, relatifs aux déclarations de guerre, au contrôle des forces de défense hongroises et à l'"ordre juridique spécial" qui se rapporte à l'état de guerre, à l'état d'urgence et à l'état de danger, laissent principalement la spécification de la plupart des détails aux lois cardinales, ce qui pourrait éventuellement soulever de sérieuses questions concernant l'étendue des pouvoirs de l'État pendant les états d'exception. g. En ce qui concerne la suppression du Conseil de défense nationale et le transfert de ses pouvoirs au gouvernement - qui est moins largement représentatif - si elle n'est pas contraire en tant que telle aux normes européennes, elle conduit à une concentration des pouvoirs d'urgence entre les mains de l'exécutif qui ne peut être considérée comme un signe encourageant, notamment en l'absence de toute clarification dans l'exposé des motifs du ratio ou de la nécessité d'une telle modification.

07/2021
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