Demandé par : République de Moldova, Parlement, Président
Mesures recommandées : a. Gouvernance et pouvoirs du SRS : la Commission de Venise souligne qu'il est impératif que le rôle, les fonctions, les pouvoirs et les devoirs des agences de sécurité soient clairement définis et délimités par la législation qui les a créées, ou par la Constitution. i. Le SRS se voit accorder des pouvoirs très étendus - et non définis -, y compris un rôle apparent de mise en application, sans fournir de recours juridiques clairs ou d'explications concernant les conséquences juridiques ou les sanctions. Les actes législatifs départementaux du SRS ne devraient pas être habilités à réglementer tout aspect des activités de renseignement sans une base très détaillée et exhaustive dans la loi formelle. Le pouvoir illimité accordé par l'article 12(1)(1) du projet de loi CE au directeur d'approuver directement et sans contrôle un large éventail de mesures très intrusives, empiétant clairement sur les droits fondamentaux, est contraire à l'état de droit, l'un des principes de base d'une société démocratique, et devrait être révisé. Le manque de clarté de la distinction entre les activités menées dans le cadre du mandat de sécurité et celles menées dans le cadre de l'enquête pénale est particulièrement préoccupant. En outre, le domaine électoral devrait également être couvert, au moins en ce qui concerne la question des opérations secrètes visant à influencer le résultat des élections. ii. Il existe un risque de subordination du directeur du SRS au pouvoir politique et la Commission de Venise rappelle sa précédente suggestion de prévoir des garanties matérielles pour la nomination du directeur et de son adjoint, sur la base de critères clairs et apolitiques. iii. Le pouvoir de coordination du Président de la République et sa relation avec le contrôle parlementaire doivent être développés et définis dans la loi. b. Responsabilité et contrôle : la Commission de Venise considère que le contrôle interne exercé par le directeur du SRS devrait être limité et défini par des normes claires et concises et que les règlements ne devraient pouvoir être tenus secrets que dans la mesure absolument nécessaire. En ce qui concerne le contrôle externe des activités du SRS : i. Contrôle parlementaire : le SRS devrait être obligé de fournir toutes les données sur le nombre et les types de mesures exécutées, et la sous-commission devrait être tenue de publier un rapport annuel sur ces données statistiques. Le sous-comité devrait également pouvoir publier un rapport spécial pour attirer l'attention du public et du Parlement sur les activités qui nécessitent une réponse urgente. La possibilité d'ouvrir des enquêtes parlementaires, qui pourraient déboucher sur des enquêtes judiciaires, en cas de soupçons d'irrégularités graves devrait également être envisagée, sous réserve des exigences liées à la sécurité d'Etat. En outre, la Commission rappelle sa recommandation antérieure de compléter ou de remplacer le « système actuel de contrôle parlementaire par une forme quelconque de contrôle par des experts indépendants ou un organisme de plaintes ». ii. Contrôle par les procureurs : le contrôle effectué par les procureurs ne devrait concerner que les affaires pénales. Le SRS ne devrait pas avoir un pouvoir absolu en accordant le droit d'accès au secret d'État aux procureurs chargés de contrôler les activités du SRS. Les informations sur l'organisation, les formes, les tactiques, les méthodes et les moyens de fonctionnement du SRS ne devraient pas être exclues du contrôle du procureur si elles impliquent une responsabilité pénale. iii. Contrôle judiciaire : pour les mesures soumises à un mandat judiciaire, la disposition prévoyant qu'un juge non spécialisé statue seul, dans un délai court, sur des questions extrêmement complexes, devrait être révisée. Les mesures prévues à l'article 12(1)(1) du projet de loi CE devraient être automatiquement soumises à un contrôle judiciaire effectif, sauf exception dûment justifiées établies par la loi. En outre, le contrôle de légalité ex post prévu à l'article 60 du projet de loi CE devrait être révisé afin de devenir effectif. Comme solution possible, et en développant l'une de ses recommandations précédentes, la Commission de Venise suggère d'envisager la nomination d'un organe d’experts indépendant externe, ayant accès à toutes les informations secrètes, et habilité à présenter des arguments au nom des personnes qui sont, à leur insu, visées par des mesures de contre-espionnage, ainsi qu'à faire appel au système judiciaire s'il le juge approprié. c. En ce qui concerne le respect des droits fondamentaux et des garanties, la Commission recommande que : i. qu'un contrôle par un juge ou un organisme indépendant soit toujours prévu, et qu'il intervienne au moins à l’un des trois stades possibles : avant l'action (autorisation), pendant l'action (contrôle continu), ou après l'achèvement de l'action (contrôle ex post) ; ii. comme il l'a fait remarquer dans son précédent avis, la loi doit prévoir la nécessité, à un moment donné, d'informer une personne des mesures spéciales qui la visent ; iii. lorsqu'une mesure est connue de la personne visée, il devrait être possible de la contester devant une autorité de recours indépendante compétente ; iv. la nouvelle disposition sur l'avertissement officiel, qui semble avoir des conséquences juridiques pénales, devrait être dûment corrélée à des garanties procédurales ; v. les dispositions relatives à la collecte d'informations auprès des fournisseurs de communications électroniques et à l'assistance qu'ils sont censés fournir au SRS soient révisées à la lumière des exigences de nécessité et de proportionnalité en termes de respect du droit à la propriété, à la vie privée et à la protection des données, mais aussi de respect de la liberté d'expression ; vi. des exceptions spécifiques à la mise en œuvre des mesures de renseignement doivent être prévues pour les avocats et les journalistes ; vii. en règle générale, la législation sur la protection des données devrait s'appliquer également aux activités de contre-espionnage, avec des exceptions étroitement définies. d. Qualité de la loi : de nombreuses dispositions des deux projets de loi sont vagues, formulées en termes généraux et peu claires ; elles ne satisfont donc pas à l'exigence de prévisibilité. Les principaux problèmes sont les suivants : i. Des notions indéfinies ouvrant la voie à des interprétations ambiguës et allant jusqu'à étendre le mandat du SRS au-delà de la notion de sécurité nationale. La portée des deux projets de loi, surtout lorsqu'ils sont évalués ensemble, s'avère floue, en raison des chevauchements entre les deux textes, de la confusion entre les longues listes de devoirs, d'obligations et de droits du SRS, ainsi que de ses fonctions / objectifs et de ses mesures / activités. ii. Dispositions peu claires, dont le sens est difficile à déceler, peut-être aussi en raison d'imprécisions dans la traduction.