Retour Kirghizistan - Avis sur la loi no 72 du 2 avril 2024 modifiant la loi "Sur les organisations à but non lucratif"

1162/2023

Demandé par : Kirghizistan, Ministre de la Justice

Mesures recommandées : La loi contient des définitions vagues et potentiellement globales, en particulier celle des OBNL exerçant des fonctions de représentant étranger et des activités politiques, et accorde un très large pouvoir discrétionnaire en matière de sanction et de contrôle, en particulier au ministère de la justice. Cette situation est aggravée par le règlement ultérieur du Cabinet des ministres, dont les dispositions dépassent notablement le champ d'application de la loi. Ainsi, ni la loi ni le règlement ne sont compatibles avec la condition de légalité. Les objectifs poursuivis par la loi ne sont pas clairement stipulés et il est donc impossible de conclure que la condition de légitimité est remplie. Enfin, les autorités kirghizes n'ont produit aucune donnée justifiant la nécessité d'introduire une réglementation spéciale pour les OBNL recevant des fonds étrangers et menant des activités politiques vaguement définies. Une telle réglementation est donc incompatible avec le droit à la liberté d'association ainsi qu'avec le principe de non-discrimination. Certaines dispositions de la loi (et du règlement du Cabinet des ministres) suscitent en outre des inquiétudes quant aux violations potentielles d'autres droits de l'homme et libertés fondamentales tels que la liberté d'expression et le droit à la vie privée. L'application de la loi (ainsi que le règlement du Cabinet des ministres qui en découle) comporte le risque sérieux et réel de stigmatiser, de réduire au silence et finalement d'éliminer les OBNL du pays qui reçoivent ne serait-ce qu'une petite partie de leurs fonds de l'étranger. En particulier, il existe un risque réel que les OBNL critiques à l'égard du gouvernement soient affectées, ce qui nuira à un débat public ouvert et informé, à la démocratie et à l'État de droit. La situation est aggravée par le fait que la loi ne semble pas prévoir un système de recours complet devant des tribunaux indépendants et impartiaux. Compte tenu de ce qui précède, la Commission de Venise recommande donc aux autorités kirghizes d'abroger la loi et de réviser la loi sur les organisations à but non lucratif, afin de créer un environnement libre et favorable à la société civile, pleinement conforme aux normes internationales en matière de droits de l'homme.

10/2024
  • Diminuer la taille du texte
  • Augmenter la taille du texte
  • Imprimer la page