Retour Des réfugiés LGBT « prêtent » leur témoignage du drame de l’immigration en Europe

16 réfugiés livrent un pan de leur histoire aux parlementaires du Conseil de l’Europe dans le cadre de la Bibliothèque Vivante du 28 juin dernier organisée à l’occasion de la Session Plénière portant sur les migrations en Europe.
Des réfugiés LGBT « prêtent » leur témoignage du drame de l’immigration en Europe

Le 28 juin dernier, Farah Abdi, 22 ans et Fares, 23 ans, s’entretiennent vivement devant l’hémicycle du Conseil de l’Europe, en attendant d’être « empruntés » par les députés réunis ce jour là pour débattre de la crise de la migration en Europe.

Ces deux réfugiés LGBT ont accepté le temps d’une journée de devenir les « livres humains » de la Bibliothèque Vivante » organisée par la Commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées de l’Assemblée Parlementaire en coopération avec le Service Jeunesse du Conseil de l’Europe.

Tout comme les 14 autres « livres humains » qui ont participé à cette bibliothèque vivante, Farah et Fares ont décidé de livrer un pan de leur vie à un inconnu qui souhaitera feuilleter quelques extraits de leur histoire.
 

Témoigner du drame de l’immigration

Aujourd’hui, les deux jeunes veulent témoigner de leur vécu en tant que réfugiés, parler du long voyage parcouru pour se construire une nouvelle vie, loin de la violence et des préjugés.

Farah, née en Somalie, a grandi au Kenya. Qui pourrait croire aujourd’hui que cette transsexuelle, féminine sur le bout des doigts, ait pu vivre la rude épreuve de l’immigration alors qu’elle n’était encore qu’une mineure ? A l’âge de 16 ans, elle décide de partir du Kenya et traverse en 9 mois « 5 pays », en passant par la Lybie pour arriver à Malte. « J’ai tenté plusieurs fois de passer la frontière mais à chaque fois, on m’a envoyée en prison », raconte-t-elle. « La Lybie, c’était terrible. J’y ai vu comment des gens se faisaient violer, assassiner, torturer », explique Farah. Mais après avoir atteint les côtes de Malte en bateau, le cauchemar ne s’arrête pas là. « Je suis restée 8 mois dans un camp de réfugiés. En réalité, c’était une prison. Pour moi, mon séjour à Malte, c’était encore pire que la Lybie », souligne Farah qui dénonce le racisme auquel elle a dû faire face dans ce pays. Mais Farah est une combattante et est bien décidée à changer le cours de son destin. « J’ai commencé à marcher et je suis arrivée en Europe. Puis, j’ai écris mon bouquin et maintenant je vis avec mon copain dans mon propre appartement à Berlin ».  Son visage s’illumine quand elle poursuit cette partie de son récit. « Je me sens tellement bien là bas, je suis enfin à la maison », dit-elle soulagée. Mais, Farah n’a pas oublié ce qu’elle a vécu et continue à lutter pour le droit des réfugiés. Auteure d’un blog sur la situation des réfugiés à Malte, Farah a obtenu le Prix International de la paix et un prix pour jeune leader de la Reine d’Angleterre. Elle a aussi narré son récit dans une autobiographie intitulée « Never arrive ».
 

Lutte pour les réfugiés et pour l’identité sexuelle

Farah et Fares parlent de leur voyage, mais aussi de leur lutte commune pour la différence et les gens vulnérables. Ils ont non seulement en commun leur vécu en tant que jeunes réfugiés mais aussi la question de leur identité sexuelle.

Fares, jeune syrien homosexuel de 23 ans, se souvient aussi de sa traversée en bateau de la Turquie vers la Grèce. « Nous étions 160 sur un bateau pneumatique. J’ai payé 1200 euros pour faire cette traversée. Là, j’ai vraiment senti la mort en face et je me disais qu’il y avait 70% de chance que j’allais mourir. A l’époque, je n’étais pas trop attaché à la vie mais j’ai senti la peur sur le visage des autres passagers et c’était terrible », se souvient-il.  

« Ce qui m’a poussé à partir, ce n’est pas seulement la peur générale de la guerre mais c’est aussi mon homosexualité » confie Fares. Arrivé en Turquie avec sa famille en 2013, Fares décide en 2015 de partir pour la France alors que sa famille est allée s’installer en Allemagne. « Je voulais vivre dans un pays où je pouvais vivre librement, sans avoir peur qu’ils apprennent » mon homosexualité, explique-t-il. « Ici, je me sens accepté, aimé et respecté ».

Fares voudrait « devenir un activiste engagé pour les droits des réfugiés ou des gens vulnérables ». « J’ai vu qu’à Bruxelles il y avait un master juste pour les réfugiés LGTB. Cette formation m’intéresse beaucoup », affirme-t-il. Mais Fares a un grand regret : « Il n’y a pas vraiment de collaboration entre les pays européens. Ils font beaucoup de conférences, de discours mais après ils ne font pas grand chose ».  

Car l’initiative lancée à l’occasion de la Journée « Les migrations et les réfugiés » va bien au delà de l’objectif de «ne pas juger un livre à sa couverture », comme on peut le lire sur le poster dressé dans le hall du Conseil de l’Europe. Le 28 juin dernier, la bibliothèque vivante visait à attirer l’attention des parlementaires sur le fait que derrière le drame de l’immigration se cachent des vies humaines et que cette tragédie est encore le fait de milliers de personnes aujourd’hui.

Strasbourg, France 28 juin 2017
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