Je m’inquiète de l’approche strictement sécuritaire qui caractérise les discussions et les textes de loi visant à renforcer la lutte contre le terrorisme. Le blocage de sites Internet sans autorisation judiciaire préalable, dont la mise en œuvre a récemment débuté en France, est un exemple clair des risques que ces mesures représentent pour les droits de l’homme, en particulier pour la liberté d’expression et le droit de recevoir et de communiquer des informations.
Je suis, en outre, très préoccupé par les propositions actuellement débattues dans plusieurs pays européens visant à renforcer les pouvoirs des services de sécurité en matière de surveillance des individus sans contrôle judiciaire préalable. Si elles sont adoptées par le législateur, ces propositions risquent d’avoir des effets liberticides et de créer un climat social néfaste, dans lequel tous les individus sont considérés comme des suspects potentiels.
Le respect de la vie privée est un droit de l’homme, auquel il ne doit pas pouvoir être porté atteinte si facilement. Les Etats ont, bien sûr, le devoir d'assurer la sécurité au sein de leurs frontières. Mais la réponse à la question de savoir comment concilier sécurité et respect des droits de l’homme doit résulter d’un débat ouvert, démocratique et tirant les enseignements de la «guerre contre le terrorisme » menée au cours de ces quinze dernières années, qui a montré que limiter des droits de l'homme afin de lutter contre le terrorisme est une grave erreur et une mesure inefficace pouvant même aider la cause des terroristes.
Ce n’est pas en réduisant nos libertés que nous augmentons notre sécurité. Les politiques qui respectent les droits de l'homme préservent les valeurs que les terroristes cherchent à détruire, affaiblissent le soutien aux mouvements radicalisés et renforcent la confiance du public dans l’Etat de droit.
C’est pour cela que j’exhorte les décideurs politiques à la plus grande prudence lors de la préparation et de l’adoption de nouvelles mesures anti-terroristes. Je les invite à s’assurer, en particulier, que ces mesures soient soumises à un contrôle démocratique efficace et que les personnes visées puissent disposer d’un recours pour les contester.