''Les migrants dans nos sociétés: Quelles politiques au 21e siècle''- Conférence des ministres responsables des questions de migration - Helsinki (Finlande), 16 - 17 septembre 2002

MŽhamed Karmouni : "La gestion harmonieuse des flux migratoires implique une réelle concertation avec les pays de départ"

Secrétaire général du Ministère de lŽEmploi et du développement social du Maroc, MŽhamed Karmouni détaille la "stratégie" que son pays vient dŽadopter en matière dŽémigration tant pour ses propres ressortissants que pour les étrangers qui transitent par le Maroc pour gagner lŽEurope.

Question : Plus de deux millions de Marocains vivent en Europe, mais cet état de fait n`est pas sans conséquences pour votre pays : comment le Maroc perçoit-il le départ de ses ressortissants?

MK : Nous souhaitons que leurs droits soient mieux protégés à lŽétranger, mais aussi maintenir et renforcer nos liens culturels et cultuels avec eux, afin de les aider à garder une "double culture", la nôtre et celle du pays dŽaccueil. Cela est dŽautant plus important que beaucoup de Marocains, après un certain âge, souhaitent rentrer au pays. Par ailleurs, nous voulons inciter nos concitoyens vivant à l étranger à investir leurs économies au Maroc; dans le même temps, nous sommes préoccupés par la "fuite des cerveaux" qui nous prive dŽune partie de nos futures élites.

Q : Arriverez-vous seuls à réaliser tous ces objectifs?

MK : Les questions posées par l‘émigration et l’immigration ne seront résolues que par une réelle coopération entre tous les pays. En matière économique, nous souhaitons que les pays européens investissent plus dans les zones de grands flux migratoires : cela permettra aux habitants de ces zones de rester chez eux plutôt que de partir, et réglera donc tant le problème de l’émigration que celui de lŽimmigration.

Q : Au Maroc aussi, l’émigration clandestine est devenue une réalité préoccupante : comment enrayer ce phénomène?

MK : De par sa situation géographique, notre pays est le point de passage privilegié de lŽAfrique vers lŽEurope. Nous sommes devenus un pays de transit, et cela pose des problèmes dŽaccueil, de santé et de sécurité. Nous avons développé tout un programme de lutte contre les "trafiquants" qui organisent des départs à partir du Maroc, et je rappelle que les deux tiers des personnes qui entrent illégalement en Europe via notre pays ne sont pas marocaines. Mais là non plus, nous nŽarriverons pas seuls à lutter contre ces phénomènes. Nous souhaitons donc que toute décision relative aux politiques d’immigration en Europe soit prise en concertation avec nous.

Q : Quel soutien attendez-vous de lŽEurope pour cela?

MK : Nous avons déjà beaucoup investi pour enrayer lŽimmigration clandestine et de transit, mais nous souhaitons que lŽEurope nous épaule concrètement dans ce domaine. De plus, nous rappelons qu’au delà du seul Maroc, tout le dossier des migrations sŽinscrit dans une perspective globale, et qu`on ne réglera la question que le jour où les déséquilibres Nord/Sud seront enfin corrigés, en particulier par le développement durable.