L’objectif de la visite était d’examiner le progrès dans la mise en œuvre des recommandations formulées précédemment par le CPT en ce qui concerne la situation dans les prisons, et plus particulièrement le phénomène de hiérarchie carcérale informelle et le problème connexe des actes de violence et d’intimidation entre détenus, ainsi que les conditions de détention des détenus adultes de sexe masculin.
Les autorités rencontrées par la délégation du CPT lors de la visite effectuée en 2018, au niveau local comme au niveau central, ont admis que le système des hiérarchies informelles entre détenus était toujours en place. La délégation a noté les efforts déployés – avec plus ou moins de succès – dans les établissements visités pour tenter de faire face à ce problème profondément ancré. Dans la prison pour mineurs de Goian, en particulier, de réels efforts ont été déployés pour développer des interactions positives entre le personnel et les mineurs ou jeunes adultes et garantir qu’aucun détenu ne soit en mesure d’exercer un pouvoir sur d’autres détenus. Cependant, les informations recueillies durant la visite indiquent que, dans les prisons de Chișinău et Soroca, l’on ne s’était de loin pas attaqué à la racine du problème de la violence entre détenus et que ces établissements n’étaient toujours pas en mesure de satisfaire au besoin le plus fondamental requis pas les détenus : un environnement sûr. Les actes de violence, d’intimidation et d'extorsions entre détenus persistaient dans ces établissements pénitentiaires, qui résultaient directement de l’existence d’un système de pouvoir informel en place parmi les détenus.
En conclusion, le CPT exprime son inquiétude quant au fait que le phénomène de hiérarchie carcérale informelle – vestige du passé soviétique – au sein du système pénitentiaire moldave a alimenté un commerce florissant, devenu une entreprise criminelle à but lucratif. Qui plus est, il n’est pas évident que les autorités compétentes apprécient pleinement l’ampleur de ce problème. Elles ne semblent pas non plus avoir conscience des graves conséquences que le phénomène de la hiérarchie carcérale informelle peut avoir non seulement sur l’ensemble du système pénitentiaire, mais aussi sur la société tout entière. Le Comité a la conviction que tant que l’on n’aura pas réussi à lutter efficacement contre ce phénomène, l’emprisonnement n’aura servi qu’à rendre une grande partie des détenus encore moins capables, à leur libération, de se réadapter à la vie libre où chacun est tenu de respecter la loi et à les rendre encore plus dépendants, en cas de retour en prison, de la sous-culture carcérale.
De l’avis du CPT, il est grand temps que les autorités moldaves prennent des mesures résolues dans l’ensemble du système pénitentiaire pour garantir la sécurité et la sûreté des détenus. Cela exige notamment de mettre fin à la pratique consistant à s’en remettre à la hiérarchie carcérale informelle pour assurer le maintien de l’ordre dans les prisons, de mettre en place un système permettant une classification et une répartition appropriées des détenus et un système efficace de recrutement et de formation du personnel pénitentiaire, et d’assurer une surveillance permanente dans les quartiers de détention.
Quant aux conditions de détention, tout en reconnaissant les efforts déployés par les autorités moldaves pour améliorer les conditions de détention dans les prisons de Chișinău et de Soroca, le CPT observe qu’un nombre considérable de détenus étaient toujours incarcérés dans des conditions qui pouvaient facilement être considérées comme inhumaines et dégradantes. Sur une note positive, les conditions matérielles dans la prison pour mineurs de Goian demeuraient généralement satisfaisantes, et le Comité a noté avec satisfaction que la construction d’une nouvelle maison d’arrêt pour les prévenus mineurs à Goian était bien avancée.
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* Le rapport a été rendu public dans le cadre d’une procédure de publication automatique introduite par les autorités de Moldova en 2011, en vertu de laquelle tous les futurs rapports du CPT sur les visites effectuées dans la République de Moldova et les réponses du Gouvernement seraient publiés sans autorisation spécifique. Le Gouvernement se réserve le droit, dans certains cas, de refuser ou de retarder la publication.