Intermédiaires internet
Les intermédiaires internet jouent un rôle de plus en plus important dans les sociétés modernes. Leur action a une influence sur nos choix, sur la manière dont nous exerçons nos droits et sur nos modes d'interaction. La place dominante que certaines entreprises occupent sur le marché leur assure la maîtrise des principaux modes de communication publique.
Quel rôle jouent ces intermédiaires ? Quel est leur impact sur les droits de l'homme, la démocratie et l'État de droit ? Quelles sont les obligations et responsabilités qui découlent pour eux de cette situation ? Le Conseil de l'Europe a élaboré des lignes directrices fondées sur les droits de l'homme pour aider les États membres à relever ce défi.
Le terme « intermédiaires internet » désigne habituellement un large éventail, varié et évoluant rapidement, de prestataires de services qui facilitent les interactions sur internet entre les personnes physiques et les personnes morales. Certains d’entre eux assurent la connexion des utilisateurs à internet, permettent le traitement des données et hébergent des services sur internet, y compris pour les commentaires créés par les utilisateurs. D’autres recueillent des informations, aident à effectuer des recherches, facilitent la vente de biens et de services ou permettent d’autres transactions commerciales. Il convient de noter qu’ils peuvent exercer plusieurs fonctions en parallèle, et notamment ne pas limiter leurs activités à celles d’intermédiaires. Par ailleurs, les intermédiaires internet animent et classent les contenus, principalement grâce à leur traitement algorithmique, et il arrive qu’ils exercent des activités proches de celles des éditeurs. En conséquence, leur rôle d’intermédiaires et leurs autres fonctions peuvent relever de différents cadres réglementaires.
La recommandation sur les rôles et les responsabilités des intermédiaires d’internet (CM/Rec(2018)2) est une ligne directrice unique façonnant une politique fondée sur l'état de droit pour la relation entre les autorités étatiques et les intermédiaires et leurs obligations et responsabilités respectives en matière de droits de l'homme, en ligne et hors ligne.
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Lire la Recommandation sur les rôles et les responsabilités des intermédiaires d’internet et ses principes clé en bref :
Obligations communes des États et des intermédiaires internet
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Il incombe avant tout aux États de veiller à ce que la législation, la réglementation et la politique applicable aux intermédiaires internet garantissent efficacement les droits de l’homme et les libertés fondamentales des utilisateurs. Parallèlement, et conformément aux Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, il appartient aux intermédiaires internet de respecter les droits de l’homme internationalement reconnus de leurs utilisateurs et des tiers qui sont concernés par leurs activités. Les États et les intermédiaires sont par conséquent contraints de collaborer. Plus les intermédiaire internet ont un impact sur les droits et risquent de leur porter atteinte, plus ils doivent prendre de précautions lors de l’élaboration et de l’application de leurs modalités et conditions de service, de leurs normes communautaires et de leurs codes d’éthique.
Légalité
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Toute demande, exigence ou autre mesure adressée par les pouvoirs publics aux intermédiaires doit être prévue par la loi, être exercée dans le cadre de la législation et constituer une mesure nécessaire et proportionnée dans une société démocratique, conformément à la Convention européenne des droits de l’homme. Tout cadre réglementaire, y compris sous forme de corégulation ou d’autorégulation, devrait s’accompagner de mécanismes de contrôle efficaces. Il importe que le processus d’adoption de la législation applicable aux intermédiaires internet soit transparent et inclusif. La législation pertinente devrait être accessible et prévisible, définir clairement les compétences des pouvoirs publics et son interprétation, son application et son respect devraient être assurés sans discrimination.
Garanties applicables à la liberté d'expression
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Toute restriction de l’accès à un contenu exigée des intermédiaires internet doit satisfaire aux conditions prévues à l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme. Il importe que les pouvoirs publics évaluent soigneusement l’impact, même involontaire, de cette mesure sur la liberté d’expression et recourent aux moyens les moins intrusifs. Les pouvoirs publics doivent également veiller à ce que des mécanismes de recours effectif soient prévus et respecter les garanties procédurales applicables. Toute ingérence des intermédiaires dans la libre circulation des informations et des idées devrait reposer sur une politique claire et transparente et se limiter à des fins légitimes précises, définies par la loi, sur instruction d’une autorité compétente ou conformément à la propre politique de restriction des contenus ou au propre code d’éthique de l’entreprise. Lorsqu’ils restreignent l’accès à un contenu en ligne, il importe que les intermédiaires agissent de manière transparente et non discriminatoire.
Utilisation des données à caractère personnel
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Il convient que les intermédiaires ne communiquent pas de données à caractère personnel à un tiers sauf si la loi l’exige ou que la demande leur en est faite par une autorité judiciaire ou une autre autorité compétente dont les décisions sont soumises à un contrôle juridictionnel, qui a vérifié que la communication de ces données est conforme à la loi. Les intermédiaires devraient limiter le traitement des données à caractère personnel des utilisateurs aux éléments nécessaires à la réalisation d’un but clairement défini, communiqué expressément et clairement à l’ensemble des utilisateurs au préalable. Le traitement des données à caractère personnel doit être subordonné au consentement libre, précis, éclairé et dépourvu d’ambiguïté de l’utilisateur, donné pour le but précisé, ou reposer sur un autre fondement légitime défini par la Convention pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel (STE n° 108).
Recours effectif
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Il importe que les États garantissent l’accès à une procédure juridictionnelle et non juridictionnelle engagée à l’encontre de toute violation alléguée de la Convention européenne des droits de l’homme commise dans l’environnement numérique par les intermédiaires internet ou les tiers.
Transparence/obligation de rendre des comptes
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L’ensemble des clauses des accords de services et des politiques des intermédiaires doivent être publiquement disponibles sous une forme claire, intelligible et accessible. Les utilisateurs doivent être informés au préalable de toute modification de la politique concernée. Le processus d’élaboration et d’application des conditions de service devrait être transparent, responsable et inclusif. Il importe que les intermédiaires fournissent des informations publiques et utiles sur le fonctionnement des techniques de traitement automatisé des données, et notamment sur le fonctionnement des algorithmes qui facilitent les recherches effectuées à partir du profilage des utilisateurs. Les intermédiaires devraient régulièrement publier des rapports de transparence qui fournissent des informations claires et utiles sur toutes les restrictions imposées à la circulation libre et transparente des informations et des idées.
Note d'orientation sur la modération du contenu
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Note d'orientation sur les meilleures pratiques en matière de cadres juridiques et procéduraux efficaces pour les mécanismes d'autorégulation et de co-régulation de la modération de contenu
Étude comparative sur le filtrage, le blocage et la suppression de contenus illégaux sur l’internet
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Le Conseil de l’Europe a commandé à l’Institut suisse de droit comparé une étude comparative sur le filtrage, le blocage et la suppression de contenus illégaux sur l’internet dans ses 47 Etats membres. Cette étude décrit et évalue les cadres législatifs ainsi que la jurisprudence et la pratique dans le domaine. Elle comprend une analyse comparative des rapports nationaux qui permet de révéler des tendances en Europe ainsi que d’éventuelles lacunes. Elle est divisée en deux parties principales : des rapports par pays et des considérations comparatives.
La conclusion de ce rapport démontre à quel point il peut être difficile pour les utilisateurs de l'Internet de comprendre et donc de consentir aux conditions de service des plateformes en ligne afin de prendre des décisions en toute connaissance sur des questions qui affectent leurs droits humains tels que les règles de restriction du contenu et le traitement des données à caractère personnel.
Organisée conjointement par le Conseil de l'Europe et la présidence de l'OSCE, la conférence (Vienne, 13 octobre 2017) a permis de débattre de questions cruciales liées aux droits de l'homme sur Internet. Consultez le rapport de la conférence.
Le comité d’experts sur la liberté d’expression et les technologies numériques a finalisé un projet de recommandation sur les impacts des technologies numériques sur la liberté d'expression, tandis que le comité d’Experts sur la lutte contre le discours de haine a élaboré des orientations sur une approche globale pour traiter le discours de haine, y compris dans l'environnement en ligne. Les deux documents seront soumis au Comité des ministres pour adoption au début de 2022.
« Toute personne a droit à la liberté d’expression »
Art. 10 de la Convention européenne des droits de l’homme